Pauvres et parvenus

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Intimes ou à l’échelle du monde, nos pensées se soulèvent et nos cris s’échappent des ventres vides pour atteindre l’horizon incertain que nous offre demain.

Des corps fragilisés par la pauvreté poussés à l’enlisement fatal, celui auquel nous assistons de plus en plus en regardant l’être humain devenu malgré lui marginal, la main tendue dans le coin d’une rue, posant pour une éternité, pour une aumône ou pour son salut … petitement assis sur ces belles avenues où se bouscule la cohue d’où émergent les rires des cannibales … dédaigneux du vide fécond dans lequel le pauvre se morfond … face à la richesse qui s’émeut sur son capital.

L’émotion naît lorsque la nuit s’avance sur la misère ! De quoi demain sera-t-il fait pour les désenchantés, les déchus de la société, béatement mais sûrement promus au rang de nouveaux pauvres par celle qui, indifférente au respect comme au plus petit élan de générosité, n’ambitionne rien moins que d’être parvenu à l’échelle des hauts revenus ? Des grades pour de nombreux assoiffés de gains obtenus autrement qu’à la sueur d’un front où ne dégouline plus que leurs seules ambitions, monnayables sur tous les horizons, l’objet de leur désir affiché dans un sourire narquois quand d’une loi à l’autre le précaire, condamné malgré lui, voit se profiler à l’horizon de ses désillusions ce qu’il redoute le plus … la déroute ; celle de ses luttes ouvrières menées depuis des centenaires, foulées aux pieds par des conquérants de l’argent roi insensibles aux valeurs riches de nos émois, émotions confrontées à l’abdication volontaire d’existences vilement brassées, à celles d’un désordre attisé dans les banlieues où la haine renaît, dans les rues où se déchaînent les passions. Dans le regard rétrograde des personnes âgées, la volonté réprimée des handicapés de surseoir à leur sort ou de vivre dans des mouroirs où rôde la mort pour quelques uns, dans les yeux de la nouvelle précarité, plus aucune lueur pour accompagner l’espoir qui peu à peu et lentement se meurt face à la privation, à la douleur, aux préjugés, aux erreurs commises au présent, au proche passé, aux promesses non tenues, soutenues par le plus commun des mortels d’entre nous qui tire les ficelles.

– par Samie Louve

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3 commentaires

  • Cruauté des puissants, mépris des faibles, dislocation sociale, recul permanent du bien commun, corruption généralisée et multiplication de ces « cachettes pour riches » que sont les paradis fiscaux: l’actualité nous livre chaque semaine de nouveaux exemples de ces ravages.
    Je ne suis pas amateur des salles obscures, je préferre de loin le grand air et la nature mais je m’intéresse un peu au cinéma. A sa façon , grâce à son immense pouvoir de diffusion, il sait dénoncer dans un large public, ces ravages occasionnés, de l’Asie à l’Afrique, l’Amérique ou le Proche-Orient, dans toutes les sociétés, par le déchainement de la cupidité, de la spéculation, du cynisme financier, qui a saisit la planète.
    A ce sujet, j’ai été séduit par un petit texte de Jean-Claude Guillebaud où il dit un peu la même chose:
    «Tout se passe comme si on avait désserré tous les frein, renversé toutes les barrières et limites:
    Le cinéma est capable d’en rendre compte en donnant à ces millions de drames un visage et une voie. Disons même qu’il se produit un phénomène étrange, notamment aux Etats-Unis. Le cinéma propose aujourd’hui une critique du néolibéralisme plus radicale encore que celle en usage dans le monde politique ou les médias. Je pense aux films féroces sur les « banksters » de la finance produits par Hollywood. Le festival de Cannes aura permis de le constater.
    Cannes ou les trompeuses apparences!»
    C’est aussi le cas du film tchadien « Gris-gris » qui met en scène un riche mafieux et ses nervis; celui du Japonais Takashi Miike:«Shield of Straw» pointe le cynisme d’un magnat de la finance. Quant à l’oeuvre de la française Claire Denis, «les Salauds», elle met en scène quelques riches bourgeois capables de se «payer» des débauches tarifées, ou pis encore.»
    Bien à vous.

    • Ce qui distingue un système libéral d’un système totalitaire, c’est qu’il permet et finance des oeuvres cinématographiques ,y compris quand elles dressent son réquisitoire. Et tant mieux si ces oeuvres contribuent à l’amélioration du système plus qu’elles ne le servent (c’est assez rare), flattent la candeur des bonnes âmes toujours promptes à s’émouvoir, plutôt d’ailleurs en paroles qu’en actions (c’est plutôt souvent), et génèrent de somptueux profits pour leurs producteurs censeurs auto-proclamés d’une société qui les transporte en limousines allongées sous les sunlights de Cannes (cela arrive).
      Les systèmes moins libéraux ont eux inventé le goulag. Quant à « l’oeuvre de la française Claire Denis… », je trouve ahurissant qu’un homme de votre qualité, Monsieur Vallet, s’en saisisse pour en faire un argument au service de vos idées d’ extrêmiste au risque pardonnez-moi, de redouter chez vous un grave syndrome obsessionnel délirant.
      Vous écrivez: « elle met en scène quelques riches bourgeois capables de se «payer» des débauches tarifées, ou pis encore. »
      Voici la critique de ce film par les Inrocks: http://cannes2013.lesinrocks.com/2013/05/23/les-salauds-de-claire-denis-le-vrai-film-punk-du-festival/

      • J’ai été séduit par les propos de Guillebaud et les ai répercutés; je n’en revendique pas la paternité car le cinéma n’est pas ma tasse de thé.
        Je consulte régulièrement les chroniques de Guillebaud car c’est un homme de bon sens, un catholique humaniste et progressiste, pas comme certain qui publie parfois dans A@P. Il n’a rien d’un extrémiste ayant un grave syndrome obsessionnel,délirant même!
        Je suis bien d’accord avec vous sur le fait que le milieu du cinéma est un milieu ouvert à tous les dérapages y compris financiers mais de mettre sur la place publique les errements de notre société, cela ne me gène pas, au contraire. L’argent n’a pas d’odeur, c’est la société libérale qui me l’a enseigné!
        Je n’ai vu aucun de ces films. Je n’ai aucune envie de voir celui de Claire Denis étant donné le contenu, mais, hélas, la réalité se rapproche de plus en plus de la fiction. Le fait qu’il provoque en nous un dégoût ne doit pas pour cela cacher le fait que ces riches bourgeois existent bien. Ils sont la face cachée de ce qu’il ne semble pas de bon ton de dénoncer.
        Quant aux «systèmes moins libéraux» qui auraient inventé le goulag, vous y allez un peu fort dans la caricature! Si je comprends bien, avec vous, il y a la bonne droite néolibérale , tout le reste est «goulagophile»! C’est un peu sectaire!