Le « non » béarnais au Parc national des Pyrénées
6 communes de Béarn et de Bigorre étaient appelées à voter avant le 12 juin sur leur adhésion (ou non) à la Charte du Parc national des Pyrénées. 63 communes ont décidé d’adhérer : 12 en Béarn (sur 30) et 51 en Bigorre (sur 56). 23 communes ont décidé de ne pas adhérer : 18 en Béarn et 5 en Bigorre. Le résultat de ces délibérations redessine une nouvelle carte du Parc national des Pyrénées, que l’on peut consulter sur Internet : http://www.parc-pyrenees.com/les-news/670.html.
Un peu d’histoire
Au début des années 60, le gouvernement français propose au Parlement de créer en France des Parcs nationaux, à l’instar de ce qui se faisait déjà dans de nombreux pays. C’est sur la base de la loi du 22 juillet 1960 que le Parc national des Pyrénées verra officiellement le jour le 23 mars 1967 (décret). Les communes pressenties pour faire partie de ce territoire d’exception avaient été consultées, en 1965. Cela a donné lieu à quelques ajustements territoriaux, et quelques communes limitrophes avaient alors demandé à en faire partie.
Le 21 janvier 2003, M. Raffarin, Premier ministre, charge un député, M. Jean-Pierre Giran (UMP) de rédiger un rapport pour un « toilettage » de la loi de 1960. En prenant, notamment, en compte la décentralisation mise en place depuis le début des années 1980, mais sans remettre en cause l’« économie générale » d’un parc national (zone cœur et zone d’adhésion). La loi du 14 avril 2006 s’appuiera largement sur ce rapport. Un décret, le 15 avril 2009, viendra préciser quelques points. Le Conseil d’Administration du Parc national des Pyrénées compte désormais 24 élus. La démarche d’écriture d’une Charte, fixant les droits et devoirs du Parc et des communes adhérentes, devait être collective. Les communes adhérentes ont désormais la possibilité de quitter le Parc, où d’y adhérer si elles ne l’ont pas fait, selon des règles connues de tous.
La Charte est l’une des nouveautés issue de la loi du 14 avril 2006. Elle a fait l’objet d’une large concertation, pendant 3 ans environ. Chaque commune pouvait déléguer un « référent » pour participer à sa définition ; certaines d’entre-elles – essentiellement béarnaises – ont choisi de pratiquer la politique de la « chaise vide ». D’autres acteurs du territoire étaient également associés : chasseurs, pêcheurs, agriculteurs, associations de protection de la nature, acteurs économiques et touristiques… (j’en oublie sans doute, qu’ils veuillent bien m’excuser). Un 1er avis a été sollicité auprès des communes sur le projet de Charte. Le projet a ensuite été validé par le Conseil d’État et le Conseil d’Administration du Parc.
Bien entendu, ce résumé fait l’impasse sur bon nombre de pans de l’histoire du Parc, qui reste à écrire. Le Parc national des Pyrénées fêtera bientôt ses 50 ans : un bel âge ! Et l’occasion, sans doute, de se pencher sur sa naissance et sa jeunesse.
Quelles conséquences ?
Elles sont multiples, selon moi, et certaines ne pourront se mesurer que dans quelques années. Elles vont avoir un impact dans de nombreux domaines. Sur la protection de la nature dans cet espace privilégié, bien sûr, mais également sur les activités humaines.
Certaines communes béarnaises, qui ont refusé l’adhésion à la Charte, vivaient très mal les nouvelles dispositions nées de la loi de 2006 et du décret de 2009. Au point de déposer un recours contre ce dernier auprès du Conseil d’État : recours rejeté. Ce qui, soit dit en passant, ne les empêchaient pas de solliciter le soutien financier du Parc… qu’ils ont eu. Logique ?
Ces communes, dans la zone d’adhésion, devront désormais s’en passer. Ce qui sera également le cas de tous les acteurs agricoles, économiques et touristiques de ces communes. Et, contrairement à ce qui a pu être suggéré, par-ci, par-là, toutes les communes de la zone d’adhésion, qu’elles aient adhéré ou pas, restent soumises aux réglementations du droit commun (chasse, pêche, forêt, environnement, etc.).
La Charte du Parc national des Pyrénées ambitionne de mettre en place un « label Parc ». Il s’agit de promouvoir le territoire du Parc, ses savoir-faire et ses productions locales. À commencer par les produits agricoles. Même par ces temps de crise, le public, de manière générale, et les touristes, en particulier, sont sensibles à un label, gage de qualité. Ce qui est tout aussi vrai pour les consommateurs.
Voilà ce qui peut être dit, quelques jours après le vote des communes de la zone d’adhésion du Parc national des Pyrénées. Dans 3 ans, les communes qui ont dit « non » pourront, si elles le souhaitent demander à adhérer, et cette demande devra être validée par le Conseil d’Administration. À suivre donc…
– par Jean-Luc Palacio
Si Alternaltives Pyrénées en a l’occasion, le Parc national des Pyrénées pourra lui indiquer quels sont les initiatives qu’il a pris pour expliquer la démarche de la Charte depuis 2009. Ce que je puis dire, en tant qu’élu municipal, c’est que le Parc a répondu aux invitations des communes qui le demandait. Ce que je peux dire aussi, c’est que certains maires n’ont pas répondu à des propositions de rencontre, au fur et à mesure de l’avancée de la démarche, et qu’ils n’en ont même pas informé leur conseil municipal.
Si j’accepte les votes (c’est la démocratie !), j’avoue avoir beaucoup de mal à les comprendre parfois.
Quant au label Parc, ce serait – selon moi – la cerise sur le gâteau. Pour deux raisons, au moins. D’abord, parce que le Parc a besoin de l’activité pastorale pour maintenir le niveau de qualité écologique du territoire dont il a, avec les communes, la charge. Ensuite, parce que les communes, propriétaires des cabanes en estive, ont consenti de lourds investissements pour les mettre aux normes sanitaires et « sociales » (de plus en plus de bergers souhaitent passer le temps de l’estive avec leur famille). Le label ne serait donc qu’une reconnaissance de ces efforts. Sans bergers, sans troupeaux en estive, les paysages se fermeraient, avec des conséquences économiques (baisse de la production de fromages), sociales (moins de bergers, y compris salariés) et environnementales (moins d’entretien en amont augmente les risques en aval).
Pardon d’avoir été aussi long.
Merci d’avoir rappelé à tous ceux qui sont concernés par le Parc National des Pyrénées parce qu’ils y vivent, y travaillent, s’y promènent, s’y adonnent à un sport ou à un hobby ou encore y viennent en touriste, son historique. Un établissement public qui a survécu à toutes les vicissitudes politiques et économiques des 50 dernières années.
Mais ne faut-il pas comprendre les nombreuses communes Béarnaises qui n’ont pas adhéré à la Charte ? L’effort d’explications a-t-il été suffisamment concret ? Le label qualité qui doit naître de cette nouvelle Charte n’est-il pas plus centré sur des préoccupations écologiques et touristiques que sur l’activité pastorales ?
Merci d’avoir ouvert le débat.