Délégation de service public

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Ils sont trois, tout de jaune vêtus, afin qu’on ne risque pas de ne pas les voir. Ils devisent en souriant sur le pas de la cahute qui fait fonction de bureau à la déchetterie de Bizanos. Tout est calme et agréable en ce petit matin de rangement et de débarras où je viens me délivrer d’objets devenus inutiles et qui traînaient là dans mon garage, en attendant qu’on leur fixe un destin. Jeter pas jeter ? Une délibération qui parfois traîne un peu, mais qui cette fois n’avait pas résisté à une rentrée pleine de bonnes résolutions.
Mais évidemment, arriver à la déchetterie avec tout son petit bazar, ses vieux cartons et quelques sacs de végétaux nécessite une grande organisation et un sens aigu de la géographie des lieux, tous les containers à gueule béante ne devant être servis qu’avec la nourriture qu’ils aiment et rien d’autre.Il me fallait de l’aide. Et nos préposés s’y plièrent de bonne grâce. L ‘électronique ? Là sur la table. Le polystyrène ? Dans le tout-venant. Le tout-venant c’est quel bac ? Là devant vous. Et les cartons doivent être mis à plat hein ? Vous les mettez dans le container cartons. Oui, Monsieur, bien Monsieur.
Rien à dire, nos préposés sont précis et professionnels. Ils ont une réponse d’ailleurs polie à chacune de mes questions et acceptent volontiers pour y répondre d’interrompre leur conversation sur leur emploi du temps du week-end. Mais ils ne bougent pas d’un millimètre. Figés sur le perron comme des canaris dans leur cage, ils gèrent leur journée d’aiguilleurs avec toute la prudence que ces travaux lourds et peut-être même pénibles requièrent, tout en devisant gaiement.
C’est au bac végétaux que j’eus en revanche une révélation. Puisque bien entendu, il ne fallait pas balancer bêtement les sacs plastiques avec leur contenu piquant et humide dans les containers. Il fallait donc les éventrer et par chance et prévenu par ma propre expérience préalable, je m’étais muni d’un outil ad hoc qui n’était pas mis à disposition localement. En revanche, c’est lorsque je vis le balai et la pelle qui me tendaient le manche afin que je procède moi-même au balayage des quelques débris végétaux que ce transfert avait laissé sur le sol que la notion de délégation de service public m’apparut clairement, sous le regard goguenard de nos 3 compères. J’avais tout compris sur l’économie mixte.
Derrière moi, une dame seule et âgée attendait son tour patiemment. Je me suis dit, laissons leur une chance, ils vont bouger et venir l’aider…
Et que pensez-vous qu’il arriva ?
Rien multiplié par 3.

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12 commentaires

  • Visiblement vous avez vu ce que vous aviez envie de voir. Mais il faut bien susciter des commentaires. De toute façon ce type de ressentiment m’arrive également.
    Votre article m’inspire un commentaire sur les petits boulots, un peu éloigné du sujet, quoique :
    Hier j’ai reçu, à domicile, une livraison d’une commande passée par Internet. J’ai vu arriver une vielle Golf qui crachait une fumée bien noire. En fait un équipage que généralement on voit passer près de chez soi avec méfiance.
    Une dame d’une cinquantaine d’années m’a remis le colis. Aujourd’hui, je viens de recevoir un e-mail avec un questionnaire bien détaillé pour évaluer la qualité du service de l’ensemble du processus de livraison.
    J’ai eu un sentiment bizarre, d’irritation au départ, puis d’estime mêlé de compassion et d’indignation ensuite.
    La Poste aurait très bien pu assurer ce service ; tout au moins le facteur pour la dernière étape.
    A l’évidence la personne en charge de la livraison avait besoin de ce travail. Elle a certainement dû se battre pour l’obtenir. Le revenu ne doit pas être bien lourd mais elle a pris cet emploi. Dans la commande, les frais d’envois étaient évalués à 7,30 Euros pour traverser pratiquement toute la France.
    Alors, quel est le bilan social et écologique de cette prestation ? Certainement compliqué à réaliser. Du moins pour le moment.
    Quel rapport avec les déchets ? : La logistique est une filière en pleine évolution (ce n’est certainement pas fini) alors que la filière déchets n’est pas encore assurée (*) et que le travail n’y est pas bien considéré (**). Dans les deux cas, l’emploi est certainement précaire et sous-payé.
    (*) : cf. la fermeture récente de l’unité de recyclage « Recyfilm » à Abidos, créée il y a peu, et qui, je pense n’a pas eu beaucoup d’écho.
    (**) : Dans ma commune s’effectue une collecte sélective et hebdomadaire des déchets. Certaines personnes déposent devant leur porte une caisse avec des déchets bien triés par nature. D’autres mettent tout en vrac, considérant que les employés sont payés pour faire le tri.
    PS: J’aurais pu également prendre l’exemple de tous les métiers (nouveaux) d’aide à la personne. Certes on trouve du dévouement mais quel est le degré de professionnalisme de tels services ? On peut se poser la question, compte tenu du service attendu, du type de travail très itinérant, des moyens financiers limités (contexte oblige) par exemple.
    Là aussi, les salaires sont faibles et une évolution de ces métiers est certaine.

  • A la déchetterie de Pau, c’est un peu moins pire. Les employés présents sont en général plus actifs que ça.
    Mais c’est Ailleurs qu’à Pau j’ai vraiment vu mieux : une déchetterie avec un seul employé (et moins de passage sans doute aussi), mais qui dès qu’on arrive avec la remorque vient voir ce qu’il y a dedans pour éviter tout risque d’erreur de container, et surtout empoigne les sacs et objets de son propre chef pour aider.
    Ca dépend donc beaucoup des coutumes locales.

  • +1 pour ce cas d’école. J’ai observé la même chose à d’autres endroits. Parfois mieux, parfois pire, le cas cité étant représentatif d’une moyenne. La première chose qui frappe du point de vue d’un travailleur du privé, c’est les emplois en grande partie fictifs…

    • Oui, mais le privé n’est peut-être épargné par les emplois fictifs non plus, même si il faut regarder d’un autre point de vue. Article à lire et qui me parait pertinent :
      http://www.slate.fr/story/76744/metiers-a-la-con

      • Dans le public, les 2 s’additionnent !: emplois partiellement fictifs dans les métiers opérationnels et supports, ce à quoi s’ajoutent les emplois supports bullshit.
        Pour ne traiter qu’un seul petit point parmi bien d’autres: une grande partie de la pub est inutile. Toutes les semaines, les grandes enseignes distribuent le catalogue des promos de la semaine à tous ceux qui n’ont pas « non à la pub » sur leur boîte aux lettres. « le poulet est à 1€ de moins cette semaine chez Carrefour par rapport à Leclerc et inversement pour la dinde etc etc ». Ces catalogues sont totalement inutiles à la société française (je dis ça par clarté de langage) mais l’enseigne qui ne le fait pas perdraient en notoriété par rapport aux autres. Solution: interdire la distribution des catalogues de promo hebdomadaires des grandes enseignes. Pour les grandes enseignes, ça ne change rien, pour la société française, c’est une dépense inutile en moins.
        La même logique peut s’appliquer sans doute à bien d’autres domaines.

        • coût pour le contribuable: 90€ la tonne de prospectus (Ademe).

          • HB, j’ai fait l’effort d’effectuer ce petit argumentaire (certes qui vaut ce qu’il vaut) alors un peu de sérieux, SVP. Le coût du papier brut + celui de l’impression + celui de la distribution manuelle pour une tonne de prospectus ne peut être qu’un nombre à 4 chiffres.

          • RdV, j’ai très bien compris votre argumentaire, par contre je pense que vous n’avez pas compris ma réponse. Dans l’exemple que vous donnez, le particulier paie deux fois:
            1- en tant que consommateur il va payer ll’impression et la distribution des prospectus publicitaires auxquels vous faites référence (prix de revient à la tonne: ?)
            2- en tant que contribuable, il va payer leur enlèvement et leur traitement dans les déchetteries (près de 95% finissent à la poubelle). Coût pour les collectivités locales: 129€ la tonne financé à hauteur de 39 € par les distributeurs et les fabricants. Coût final pour les collectivités locales: 90 €.
            Il est vrai que l’argent ainsi dépensé tant dans le public que dans le privé augmente le PIB et crée des emplois: plus de 35000 pour distribuer les prospectus et plus grande part du Chiffre d’Affaire de l’impression.

          • 129 € le coût de la tonne de papier enlevée et traitée en déchetterie, ça me parait peu, mais admettons. Par contre, l’essentiel du coût repose sur le consommateur, qui paie pour ces bullshit jobs, alors qu’il y aurait toute une industrie de produits utiles à créer et récupérer si nos politiques dirigeaient correctement le pays (s’ils avaient le sens de l’intérêt général combiné à une connaissance de l’économie réelle et une vision de celle-ci pour l’avenir).

          • @Oscar: ces publicités ne sont pas utiles à la société. Chaque enseigne en fait pour ne pas perdre de notoriété par rapport aux autres. C’est le con-sommateur qui paie in fine une somme aussi inutile que le contribuable lorsqu’il s’agit d’impôt pour payer des éléphants blancs ou des emplois fictifs.
            La publicité sur les cigarettes est interdite et ça n’empêche pas ceux qui le souhaitent d’acheter des cigarettes.

          • @Oscar: « interdire la publicité ? »
            Non. La réguler davantage. Supprimer les grands panneaux publicitaires aux entrées des agglomérations comme cela se fait, pour des raisons esthétiques. Interdire ces excès de pub inutiles de la grande distribution (petits catalogues hebdomadaires).

    • cyrano de bellegarde

      lors de mon installation a PAU, j’ai beaucoup fréquenté la déchetterie, de PAU,et les employés étaient attentif et filaient la main, avec un mot aimable a chacun de mes passages. pour mon installation a Bergerac un centre de tri « grandiose » plus de 20 bennes différentes en plus de électroménager, l’amiante, les vêtements, bouteilles plastiques, verres etc, ….. et de nombreux surveillants qui donnent de bon conseils, dans le genre, pourquoi vous vous emm..dez faites comme tout le monde, brulez dans le jardin.