Journée Nationale de l’Ingénieur : la feuille blanche de François BAYROU
La JNI, tenue à l’EISTI le jeudi 2 avril, a été l’occasion d’entendre François BAYROU s’exprimer sur le métier d’ingénieur.
Pressé par un conseil communautaire, le maire de Pau avait tenu à passer pour ouvrir la JNI. D’entrée, François BAYROU a rappelé que, quand il était ministre de l’Éducation Nationale, il avait aussi en charge la recherche, territoire d’excellence technique et scientifique.
S’affirmant comme un fervent défenseur des écoles d’ingénieurs et de cette spécificité française qu’est l’ingénieur qui n’a pas d’équivalent à l’étranger. En bon lettré, il revient sur l’étymologie du mot ingénieur et rappelle le « génie » qui en fait partie et l’origine romaine « ingenium » qui veut dire talent.
A ce stade, l’auditeur pouvait se dire que tout cela était bien conventionnel. Arrive alors une critique de l’Education Nationale, qui laisse « trop de place à la reproduction et pas assez à la création ».
Et l’écrivain qu’est François BAYROU parle alors de sa pratique de la création. N’écrit-il pas des livres ? Sa méthode : pas de plan défini, ni arrêté d’avance mais bien une page blanche. Reste alors à avoir confiance et « se lâcher comme un funambule sur le fil ».
L’écrivain et l’inventeur ont cela en commun : ceux ne sont pas des gens qui reproduisent. Reste « à faire confiance en la source mystérieuse à l’intérieur de nous » et d’interpeller plus précisément les jeunes étudiants-ingénieurs présents : « Faites-vous confiance ! » en les incitant à innover et de finir, en leur rappelant ce rôle précieux qu’ils ont dans la société.
François BAYROU quitte alors la JNI laissant la place à une table ronde sur « les interactions entre ingénieurs, scientifiques et décideurs publics afin de favoriser la compétitivité des industriels ». Une table-ronde, avec la participation de Jérôme PORFIRIO, Directeur du Pôle de Compétitivité AVENIA, Christophe DERAIL, Vice-Président délégué à la valorisation et au transfert de technologie de l’UPPA et Youssef ERRAMI, professeur à l’ESC Pau, qui permit de découvrir comment ces interactions se développent notamment entre les laboratoires de UPPA et les industriels ou dans le cadre du Pôle de Compétitivité.
Les intervenants se retrouvent sur des mots clefs qui reviennent : rechercher l’excellence, faire du haut de gamme pour être compétitif, tirer vers le haut par l’innovation. Les professionnels et le politique se retrouvent : innover en permanence.
Mais, l’innovation, pour des motifs budgétaires est de plus en plus difficile à réaliser seul. Une solution d’avenir : développer le collaboratif comme s’y emploie le Pôle de Compétitivité qui est le seul en France a avoir la « compétence » géoscienses. (voir : le site)
Autre idée forte qui s’adresse aux étudiants présents : entreprendre. Les freins sont évoqués avec les difficultés de financement et cette propension qu’ont les jeunes diplômés à chercher la sécurité dans les grands groupes. Pourtant, selon Christophe DERAIL, ce sont souvent les PME où il y a le plus d’innovation. D’ailleurs, elles viennent de plus en plus travailler avec les laboratoires de l’UPPA qui a 11 à 12 millions d’euros de budget de recherche dont 5 millions de contacts de collaboration avec les industriels.
Vient alors le moment des témoignages : Ceux de Pierre CHIQUET et Guilhem CAUMETTE, ingénieurs chez TIGF qui transporte, stocke et distribue du gaz naturel sur 15 départements du Grand Sud-Ouest. 5000 kilomètres de tuyaux, tous enterrés, deux aires de stockage souterrain, 560 salariés dont 350 à Pau. Des priorités : la sécurité, la régularité du service aux clients tout en étant respectueux du développement durable. Une société qui a sa propre R&D mais dont une partie est réalisée en collaboration avec l’UPPA; une collaboration de 10 ans avec le laboratoire de Chimie organique de l’université, celui de fluides complexes ou encore avec l’équipe environnement et micro-biologie. Derniers travaux en commun : la modélisation actuelle de la zone de stockage d’IZAUTE. (Voir : le site)
Manuel SILVA, Chef de Projet Recherche et Technologie de TURMOMECA nous fait entrer dans une autre dimension : Celle de TURBOMECA, le N°1 mondial des réacteurs pour Hélicoptères avec un tiers du marché. Filiale du Groupe SAFRAN, TURBOMECA emploie 2600 salariés à Bordes, 1544 à Tarnos, 498 à Toulouse (spécialisation : missiles) et 320 à Mantes. Pour rester en « pole position », le motoriste investit 15% du chiffre d’affaire en R&D. L’innovation est au coeur de la compétitivité pour l’entreprise qui développe actuellement 10 moteurs et a déposé 70 brevets en 2014. Pour maintenir le cap, « TURBO » bénéficie d’une force de frappe de 1000 ingénieurs. (Voir : le site)
Pour Manuel SILVA, l’importance des projets et donc de leurs financements, amène la société à faire de la recherche en partenariat… avec ses principaux concurrents. D’ailleurs, quand l’Union Européenne lance des appels à projets, ils sont faits au niveau de l’Europe et non pas au niveau national. Bref, il vaut mieux y aller groupé… La compétitivité, il faut la chercher à plusieurs.
Pierre SAUBOT, la compétition, il la connait. Haulotte Group n’est-il pas devenu le numéro 1 européen et 3 mondial du « matériel d’élévation de personnes et de charges dont le cœur de la gamme est la nacelle et le chariot télescopique » ? (Voir : le site). Pour atteindre ce classement, 1.500 collaborateurs sont basés sur 6 sites industriels, 20 filiales et bureaux répartis sur 5 continents. Dans un environnement international, extrêmement compétitif, l’innovation est considérée comme le facteur-clé de succès. Pour innover, il faudra d’abord écouter « les utilisateurs pour anticiper les exigences et les besoins afin de concevoir les produits, les accessoires et les services qui répondent à la demande » et, ensuite se battre sans cesse sur les coûts de fabrication : « il n’y a jamais de limite à la baisse d’un prix de revient industriel ». La compétitivité se gagne aussi par les prix.
Pierre SAUBOT nous expliquera alors comment, à ses débuts, en mettant « la main à la pâte », il arrivait à créer des standards de productivité qui boostaient littéralement ses équipes.
Parmi ses méthodes : toujours rester au cœur de son métier et déléguer le reste. Mais aussi, veiller à rassurer en permanence un noyau dur de collaborateurs en leur donnant, ce qui aura été le deuxième mot-clef* de la soirée : confiance !
La JNI se termine par l’intervention de Nicolas DAGES, élève de troisième année à l’EISTI, qui projette sur écran une application de « cloud computing », développée dans le cadre de ses études. Sa caractéristique : permettre à des palois, ou des visiteurs dans la ville, de trouver, sur son i-pad ou son smart-phone, les cinémas, les places de parkings disponibles, les horaires d’ouverture des commerces etc. Une apps (application) particulièrement pratique !
– par Bernard Boutin
* Le premier étant « innover »
Les organisateurs de la JNI
– L’URISBA : Voir le site.
– Le Bureau Régional des Élèves-Ingénieurs Pyrénées : Voir le site.
– L’Ecole internationale des sciences du traitement de l’information : Voir le site de l’EISTI.
La JNI sur AltPy
– JNI 2015 : France : une compétitivité nationale fortement bridée
– JNI 2014 : Innover et Entreprendre
Parmi les freins à la créativité évoqués , Jérôme PORFIRIO a cité en premier lieu « la honte de l’échec ». Si je retiens l’idée, je préfère le terme « peur de l’échec » plutôt que « honte ». A mon avis, la peur de l’échec est toujours présente chez tous ceux qui rêvent d’entreprendre et c’est un facteur inhibiteur important qui conduit souvent au renoncement. Mais tous ceux qui parviennent à dominer cette peur et se lancent quand même, n’ont jamais « honte » de l’avoir fait, même s’ils connaissent l’échec.
Et je vais plus loin : avec l’expérience, on réalise qu’il ne faut pas avoir peur de l’échec, au contraire. L’échec est toujours plus instructif que le succès. On ne sait jamais vraiment pourquoi on a réussi : on a peut-être eu de la chance, bénéficié de circonstances exceptionnelles particulièrement favorables, eu des compétiteurs particulièrement mauvais, etc… Bien sûr, on est content d’avoir réussi mais cela ne nous incite pas à nous remettre en cause, ni même à analyser les raisons de notre succès. Par contre, quand on échoue, on cherche à savoir pourquoi : quelles ont été nos fautes ou nos erreurs ? A quel moment avons-nous fait un mauvais choix ? Pouvions nous faire autrement ? … Et, par la suite, nous saurons éviter certaines erreurs.
Finalement, l’expérience n’est rien d’autre que la capacité à profiter de toutes les erreurs que nous avons pu commettre et que nous avons réussi à corriger.
Alors j’ai envie de dire à tous ces jeunes ingénieurs : N’ayez pas peur de l’échec ! Vous en connaîtrez dans votre carrière, mais c’est ainsi que vous progresserez et que vous deviendrez de bons ingénieurs créatifs. Et oubliez définitivement le « Principe de Précaution », cette absurdité colossale qui prône l’inactivité totale et le risque zéro.
« Et oubliez définitivement le « Principe de Précaution », cette absurdité colossale qui prône l’inactivité totale et le risque zéro. »
Absolument ahurissant!!!!!
Monsieur Bayrou parle bien et écrit bien. C’est quand même appréciable.
Mais M. Bayrou a également fait remarquer qu’il y avait peu de monde à la réunion. Effectivement, surtout si on compare à l’année dernière.
M. Bayrou a certainement pensé, en bon gestionnaire, que son temps accordé n’allait pas être très rentabilisé. Pas sûr qu’il revienne l’an prochain.
La réunion était très intéressante. Mais avoir l’avis des étudiants vaudrait mieux que le mien.
L’intervention de M. Saubot et le rappel de son départ d’une Société confortable à 42 ans pour reprendre une affaire m’a rappelé que cette interrogation, cette tentation, est le lot de la plupart des cadres après une première expérience professionnelle. Encourager ce passage à l’acte serait certainement bénéfique pour l’économie.
Je trouve que les rappels aux rigidités, voire handicaps, de la France sont toujours convenus.
M. Derail en rajoutait quand même un peu trop. Adopter les pratiques anglo-saxonnes ne suffira pas à que tout aille mieux pour l’activité en France. Le témoignage de M. Silva de Turboméca m’a semblé remettre un peu de réalisme dans ce
« méa culpa » permanent sur la situation de la France.
La méfiance, l’individualisme et le manque d’habitudes ou d’aptitudes aux actions collectives sont aussi des caractéristiques que des lois et règlements ne changeront pas.
Si déjà nous ne dépensions pas plus que ce que nous gagnons serait bien.
J’ai également apprécié la présentation de M. Dages, étudiant, sur l’application du Cloud Computing. J’ai pensé à Smart City. Il me semble que la page est encore bien blanche dans ce domaine à Pau ou en Béarn. Un commentaire de M. Bayrou aurait été intéressant.
Smart City ? Nous sommes quelques uns à avoir déjà rédigé le plan et sa feuille de route. L’avantage de l’agglomération paloise : Elle dispose déjà de sa propre infrastructure de communications à très haut débit. Pas besoin de construire un réseau fibre optique, il est déjà là. Et il appartient à la Collectivité. Contrairement à quantité d’autres villes françaises ou espagnoles, nous ne partons pas, dans ce domaine, de la feuille blanche. Y a plus qu’à…
Je pensais aux systèmes de transport intelligents à horizon 2025 qui nécessiteraient des réseaux de capteurs interconnectés, à bord des véhicules, sur les bords des routes et des rues, avec des infrastructures importantes ; caméras, portiques, radars. Le tout relié à un poste central. Etc…
Je pense que c’est très important et qu’on est loin d’avoir tout équipé à Pau et dans le Béarn
Mais, ce sujet dépasse le thème de la journée.
«Arrive alors une critique de l’Education Nationale, qui laisse «trop de place à la reproduction et pas assez à la création».
Une merveille d’incompréhension! C’est bien triste pour un prétendant à la Présidence de la République, un ex, et j’espère pas un nouveau, Ministre de l’Education nationale! Sinon, nos enfants seront en danger!
La biologie, ce n’est vraiment pas sa tasse de thé! Il n’y comprend rien; «la reproduction», depuis l’avènement de la sexualité, vraisemblablement depuis environ 1,5 milliard d’années, n’est que que CREATION!
La fécondation et la naissance, donc la reproduction, dans tout le monde animal, végétal et fongique, n’est pas reproduire la même chose comme dans la sacrosainte «croissance quantitative économique humaine» mais du différent, du nouveau, de la CREATION PERPETUELLE. de la biodiversité, réservoir incontournable pour faire face aux transformations imposées par l’environnement naturel. Cette biodiversité c’est aussi de la croissance mais elle est qualitative, c’est une force adaptative, la seule qui assure la durabilité de l’économie écologique. Voilà pourquoi, n’en déplaise à M.Bayrou, la reproduction est si souvent expliquée dans l’enseignement!
M.Bayrou devrait lire, et les chefs d’entreprise aussi, » Un paléoanthropologue dans l’entreprise » de Pacal Picq!
Que vous n’aimiez pas François Bayrou, libre à vous Monsieur Vallet.
Mais la seule « qualification » d’agrégé est un peu courte pour attaquer -au prix d’un énorme contresens- ceux qui comme F Bayrou pratiquent correctement la langue française.
Dans la citation qui vous fait éructer «trop de place à la reproduction et pas assez à la création» votre intelligence(?) a entendu et compris de façon limitative:
reproduction = fonction où les êtres vivants perpétuent l’espèce
Pourtant il est clair -au moins pour ceux qui analysent et prennent le temps de comprendre- qu’il s’agit de la part de F. Bayrou d’une remarque de plein bon sens où la biologie n’est pas visée.
F. Bayrou, privilégiant la création à la place de la reproduction insistait, sur un mode de pensée et d’action qui est plus que jamais indispensable: quitter les vieux schémas, en finir avec des habitudes devenues stériles, évacuer les anciens réflexes. D’où en trois mots: en finir avec la REPRODUCTION rafistolée et donc de la CRÉATION pour savoir trouver les solutions adaptées à un monde qui change.
Avec de la création qu’elle soit intellectuelle, technologique ou sociétale, la biodiversité y trouvera également son compte, quoi que vous en pensiez Monsieur Vallet !
Ceci ayant été dit, je ne suis pas pour autant devenu un inconditionnel de François Bayrou. Que celui-ci veuille bien m’en absoudre.
« qui vous fait éructer »
Si M.Bayrou pratique correctement la langue française, ce n’est pas votre cas; il faut revoir la définition du mot injurieux que vous utilisez. Ce n’est pas de cette manière que l’on se livre à des échanges fructueux. Avec vous, c’est trop souvent comme cela; manifestement, si vous n’avez rien contre M.Bayrou, ce n’est pas le cas vis-à-vis d’autres! Régler des comptes ce n’est pas le terrain d’A@P.
« quitter les vieux schémas, en finir avec des habitudes devenues stériles, évacuer les anciens réflexes »
Jugement de valeur; faites preuve de « créativité » en ne reproduisant » pas ces propos sans exemples n’ayant pour but que de critiquer pour critiquer!
J’attends les propositions créatrices dont vous devez sans doute avoir le secret!
En ce qui concerne la reproduction, la croissance quantitative que M.Bayrou défend certainement, en est un exemple; On produit des milliers de voitures semblables qui ne se vendent pas, des millier de yaourts identiques qui finissent à la poubelle……..C’est dans ce domaine qu’il faudrait passer de la reproduction à la création!
Il fallait lire naturellement « des milliers » de yaourts!
«En bon lettré, il revient sur l’étymologie du mot ingénieur et rappelle le «génie» qui en fait partie et l’origine romaine «ingenium» qui veut dire talent.
En associant étroitement «ingénieur» à «génie» et «talent», F.Bayrou s’est plus comporté en «politicien habile» qu’en «bon lettré» précis!
Devant un tel parterre, il ne pouvait pas se comporter autrement!
Quelques petites précisions.
Pour le Robert, Ingenium (in-geno, gigno):
Se rattache à une importante famille indo-européenne de mots se rapportant à l’engendrement et à la naissance. On y associe les termes de gène, génital, engendrer, génétique, oxygène, hydrogène…L’in-génieur, ce qui est dans le «gène», est avant tout seulement celui qui crée.
Son usage, dans la langue latine, évolue, il se répartit autour de quatre thèmes distincts: qualités innées d’une chose, dispositions naturelles, tempérament, manières d’être des êtres humains, dispositions naturelles de l’homme: intelligence, l’habileté, inventivité, enfin des hommes qui sont particulièrement doués de cette faculté d’où la notion de talent: le don, l’aptitude.
Le mot «génie» a subi une évolution au cours du temps.
Primitivement c’est donc celui qui crée, puis, sous l’influence du terme ingénieur, il a pris ultérieurement une signification plus ciblée autour de la notion de technique et «d’ingénierie»: génie militaire, maritime, civil. (définition Web: un ingénieur est un professionnel exerçant des activités de conception, d’innovation et de direction de projets, de réalisation et de mise en œuvre de produits, de systèmes ou de services impliquant la résolution de problèmes techniques. Ce n’est pas encore «un génie»!
Le sens initial s’est maintenu dans «le génie génétique».
Il a dérivé vers un jugement de valeur; celle portée par une personne qui se démarque de façon exceptionnelle par un ou plusieurs talents ( qui est «ingénieux»).
Enfin, récemment, le langage commun a galvaudé le terme en l’attribuant à une personne ou à un fait que l’on admire :«tu es génial!»
Monsieur Bayrou, en fin politicien, a sélectionné le sens qui lui convenait en jouant avec les différents sens des mots, n’hésitant pas à laisser sous-entendre que les ingénieurs sont des génies!
Parmi les différentes approches du Larousse, on trouve: ingénieur= officier du génie (et non de génie!)
Bayrou est tout à fait au coeur de sa spécialité, il parle de choses qu’il ne connaît pas.