Mais qu’est-ce qu’ils veulent

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agoraLes interprétations portées sur les actions menées par les manifestants de« Nuit Debout» sont diverses ; il en découle de nombreux avis; on peut lire, entre autres :

«Pas d’AG, pas de représentant, chacun parle en son nom,…., Qu’est-ce qu’ils veulent ?».

«Quand on a dénoncé une situation, après qu’est-ce qu’on fait ?»«Ce sont des mouvements d’extrême gauche, allez coucher !»

La réponse ne peut pas être dans le slogan mais dans l’analyse.

Pour aborder le sujet, il convient de le situer dans son contexte, celui d’un monde numérique ouvert à tous et qui ne connaît plus le temps, l’espace, la hiérarchie. L’ubérisation passe par là et transforme les relations verticales en relations horizontales; bien ou mal ??? C’est ainsi !

Ce n’est plus la coordination par le cerveau, c’est la domination des organes !

Difficile à admettre pour un biologiste !!!

Toutes ces réunions informelles font penser à des situations déjà vécues au cours de l’histoire.

> Entre l’Agora athénienne et Nuit Debout, il y a de troublantes similitudes écrit le Philosophe Arnaud Placé :«le partage démocratique peut se nourrir d’une expérience commune..»

>Jésus de Nazareth entouré de quelques disciples, anima des réunions d’échanges ouvertes en Galilée. Il suscita engouement et ferveur et s’attira la méfiance des autorités politiques et religieuses, avant d’être arrêté et condamné par le préfet Ponce Pilate.

«Cette minorité microscopique» (D.S.) a fait son chemin depuis !

>L’usage des cahiers de doléances remonte au XIV ème siècle. Les plus notoires restent ceux de 1789. On recensait les mécontentements, on proposait des solutions, et, après, le monarque absolu triait,

maintenant c’est le marché.

L’ouverture de nouveaux cahiers de doléance ne serait pas une mauvaise chose afin de faire un état des lieux ; système certainement bien plus efficace que de palabrer en faisant un tour de France à pied ! Ainsi, dans ces réunions, on n’a pas toujours à faire à des farfelus faignants et illettrés comme certaines analyses le laissent penser ; on démonte la Loi Travail en citant les propos :

  • D‘ Eloi Laurent dans «Nos mythologies économiques». Éditions LLL.

«En quarante ans, aucune baisse du chômage n’a jamais été lié à la flexibilité»

  • de Sassia Sassen dans «expulsions» Gallimard.

«A l’ère globale des privatisations, de la dérégulation et de l’ouverture des frontières, on est passé d’une dynamique intégrant les individus à une dynamique qui les exclus, conception pathologique de la croissance»

>Ce comportement consistant à proposer des masses de solutions, à bâtons rompus, chacun parlant en son nom, est très darwinien, c’est la base même de la réussite de l’évolution biologique ; il est aussi celui qui, grâce aux nombreuses recherches effectuées par chaque chercheur dans son coin, au cours des temps, a permis l’accumulation de données scientifiques qui un jour se sont synthétisées en retombées génératrices de progrès pour l’humanité. C’est le principe de la recherche fondamentale qui oriente le progrès technologique ou recherche appliquée.

>Le «brainstorming» est la forme «up to date» de ces réunions de réflexion pratiquées dans certaines entreprises ; elle permet de créer du nouveau et de sélectionner ce qui est utile en fonction des exigences du moment, laissant le reste en réserve pour l’avenir.

>La sélection agricole par le biais des croisements générant des hybrides polymorphes ne fait rien d’autre que de créer de nombreuses variétés nouvelles dont on choisira les plus intéressantes.

Voilà pourquoi :

Quand les gens prennent la parole, il vaut mieux les écouter qu’essayer en vain de les faire taire !

Ce qu’ils veulent existe, je l’ai rencontré.

Un personnage virtuel, bien dans la modernité donc et dans le ressenti conscient ou inconscient de tous ces participants, l’exprime. C’est une fille, ce n’est pas par hasard, car les femmes ont, par la force de leurs convictions, de leur courage, de leur intelligence, conquis la légitimité de prendre les reines de la décision et de l’action, tout autant que les hommes. Elle s’appelle Petite Poucette. Cette héroïne créé par Michel Serres représente la jeunesse du monde moderne qui respire, pense et agit dans le numérique.

Vous vous moquez , dit petite Poucette, de nos réseaux sociaux. « Vous redoutez qu’à partir de ces tentatives apparaissent de nouvelles formes politiques qui balaient les précédentes, obsolètes !!»

Pouvons-nous rester fiers des résultats de nos politiques passées ?

«Armée, nation, église, peuple, classes, prolétariat, famille….,voilà des abstractions maintenant, volant au dessus des têtes. Incarnées, dîtes-vous ? Certes, sauf que cette chair humaine, loin de vivre, devait souffrir et mourir. Sanguinaires, ces appartenances exigeaient que chacun fît sacrifice de sa vie : martyrs suppliciés, femmes lapidées, hérétiques brûlés vifs, prétendues sorcières immolées sur les bûchers, voilà pour les églises et le droit ; soldats inconnus, alignés par milliers dans les cimetières militaires, liste longue de noms sur les monuments aux morts, en 14-18 : presque toute la paysannerie ; voilà pour la Patrie ; camps d’extermination et goulags, voilà pour la théorie folle des «races» et la lutte des classes ; quant à la famille, elle abrite la moitié des crimes, une femme mourant chaque jour des sévices du mari ou de l’amant ; et voici pour le marché : plus d’un tiers des humains souffrent de la faim pendant que les nantis font des régimes.»

«Gascons ou picards, catholiques ou juifs, riches ou pauvres, hommes ou femmes, nous appartenions à une paroisse, une patrie, un sexe…» En France, tous ces collectifs ont explosé. Quant aux intégrismes, religieux ou nationalistes, Petite Poucette a des amis musulmans, sud-américains, chinois, elle les fréquente en classe, sur Facebook, Twitter,…, chez elle, partout dans le vaste monde. «Pendant combien de temps lui fera-t-on encore chanter qu’un sang impur abreuve nos sillons» ?M.Serres

La finance, la politique, l’école, l’entreprise, l’Eglise… Il n’y a pas un domaine qui ne soit pas en crise ! Les institutions, complètement dépassées, ne suivent plus ; «La voix notait (périodiquement) son vote sur un bulletin écrit, local et discret ; elle occupe aujourd’hui la totalité de l’espace. La voix vote en permanence.» L’avenir de la planète, de l’environnement, etc., tout est bousculé, menacé. «Il n’y a plus que de la motricité ; plus de spectateurs mais des acteurs, plus de puissants dans l’arène politique, rien que des décidés. Celui qu’une ancienne publicité dessinait comme un chien n’entend plus la voix de son maître, il n’y a plus de maître.» M.Serres.

Voilà pourquoi Petite Poucette voudrait que cela change !

La solution, elle la recherche dans la rupture avec les codes du passé, par la réflexion collective, pour ouvrir de nouvelles pistes humanistes qui ne sont pas écrites d’avance et dans un contexte qui n’existait pas avant !

«Le jour où le peuple s’éveillera !», disaient certains ; nous y sommes peut-être. Si on attend trop, attention ! «plus on s’élève et plus dure sera la chute» !

par Georges Vallet

credits photos:agora.forum-nation.com

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  • D.S . 23 et 24 avril.
    « Bis repetita placent ». Horace « Art poétique

  • Simplement quelques activistes d’extrême gauche à qui on fait beaucoup trop de publicité :

    « Il y avait le serment du Jeu de paume. Il faudra désormais compter avec le serment de la Bourse du travail. Il n’est pas sûr en revanche que celui-ci marque l’Histoire. À l’issue de trois heures de débats, le journaliste François Ruffin, réalisateur de Merci patron ! et initiateur de la Nuit debout, fait se lever la salle et lui demande de brandir sa main droite. « Non, la gauche ! », suggère un participant pour plus de cohérence idéologique. L’ensemble de l’assemblée obtempère et fait le serment de « ne plus jamais voter PS ».
    Alors que le mouvement Nuit debout se revendique comme apolitique et qu’il s’est construit en indépendance totale vis-à-vis des partis, il est étrange d’assister soudain à une telle mise en scène, en décalage avec cette volonté de se tenir loin des tractations et autres logiques d’appareil. » (Médiapart 21 avril)

    Bon, c’est au cas où il y en aurait encore qui dormiraient debout…