Un esprit sain dans un corps sain, qu’ils disaient
L’actualité quotidienne dans laquelle nous baignons génère une atmosphère particulièrement malsaine et déstabilisante. La pollution physique et chimique touchant les individus dans leur chair a été abordée ; il existe une autre forme, tout aussi redoutable, insidieuse aussi, atteignant l’esprit et son fonctionnement psychologique, son indépendance, sa liberté. Cet autre mal qui répand le terreur est :
la pollution psychologique.
«On a calculé par exemple, sur une journée de quatorze heures, que l’individu est exposé en moyenne à un nombre de sollicitations variant de 300 à 600. Le phénomène de pollution psychologique a été aggravé ces dernières années par l’usage du téléphone portable dans les lieux publics portant ainsi à son paroxysme, la pollution sonore qui est une forme de pollution psychologique» ( http://changementclimatique.over-blog.com/article-36409592.html )
La vie de tous les jours nous confronte à une infinité «d’informations» diffusées par la presse, la radio, la télévision, la publicité fixe ou mobile, les réseaux sociaux, le bouche-à-oreille dans nos rencontres journalières…; Le tri devient impossible entre les vraies, les fausses, les supputations, les rumeurs… placées sur le même plan, au choix ; beaucoup sont programmées pour nous manipuler, orienter notre pensée et nos comportements.
On pense aussitôt à la propagande politique, au matraquage médiatique, aux annonces publicitaires ; c’est en première ligne, mais il est facile de les identifier et de s’en méfier. Si on s’y laisse prendre, par lassitude, parfois par tentation, notre responsabilité, en cas de désillusion, est entière.
Par contre, les manœuvres les plus dangereuses sont cachées, invisibles donc pour la plupart d’entre nous ; pendant un temps, la technique du message subliminal audio ou visuel était utilisée ; heureusement elle est maintenant interdite; est-ce vraiment appliqué ? Je l’ignore. D’autres formes existent comme l’introduction de supports vivants ou automatiques transmettant des messages appropriés dans les réseaux sociaux ou autres, la pression des lobbies au niveau des clubs et les rencontres attractives avec les élus, les partis, le monde médical ou l’entreprise ; elles permettent de diffuser des pressions qui seront répercutées, en nous court-circuitant, au niveau législatif…
Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science, grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, sont parvenus à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. A côté des avantages énormes pour notre bien être et notre santé, des retombées, voulues ou non, assurent la manipulation de l’esprit et modifient la posture psychique de l’individu. Évoquons :
+ La surcharge de communications, de sms, d’images télévisuelles, d’incitations à consommer ; dans ce domaine, les sollicitations sont : passer du temps, de l’espace, de l’argent pour faire jouer la concurrence ! Abonnements chez qui ? En illimité ou forfaits, de combien….? Quand nous avons trouvé le bon endroit pour se ravitailler, des choix cornéliens s’imposent ; le fait de devoir choisir, sur le même rayon, entre 20 marques de yaourts, de jambon ou d’œufs, en vérifiant toutes les inscriptions à peine lisibles, connaître le contenu des codes, frais, extra frais, bio ou pas bio, l’origine, la composition (sulfites, nitrites, sucres, sel, acides gras,…), la date de péremption… entraîne tension psychique et épuisement cognitif : plus de choix, plus de stress. Beaucoup ne regardent rien mais payent quand même (c’est inclus dans le prix) le travail imposé aux entreprises ; c’est l’art de décharger la responsabilité sur le consommateur !
La profusion est une agression !
Et l’on voit le pauvre diable
Menacé comme un coupable
Sous cette arme redoutable…
Notre esprit devient moins performant alors qu’on est déjà en retard pour récupérer le bambin à l’école, là où on ne peut jamais garer !
Tout cela, sans oublier qu’il est indispensable d’éplucher les contrats bancaires pour changer le plus vite possible de banque (C dans l’Air de vendredi 17/02/17)
+ Les interruptions constantes brisent la réflexion : dans la rue, le bruit, les signaux publicitaires, à la maison nous zappons à la télévision ou surfons sur Internet. Dans la journée, ce sont les appels sur les téléphones fixes ou portables, les mails ou sms ; au moindre temps mort, on en profite pour téléphoner ou vérifier la messagerie, sans oublier de suivre en temps réel sa consommation énergétique grâce à……!
Achats compulsifs, boulimie, troubles attentionnels et autres(sommeil), les déstabilisations sont incessantes. Quel progrès !!!!!
Certains trouvent aussi le temps de donner leur opinion sur la gestion financière, en général catastrophique, du domaine public. C’est précieux pour ceux qui ont bien d’autres soucis pour s’y intéresser. Cependant, là aussi, pour plus d’objectivité, il faut faire jouer la concurrence car des avis contradictoires, souvent très solides, sèment le doute. Qui croire ? Encore de quoi troubler les esprits ! Ne parlons pas de la période électorale, c’est l’apothéose de la pollution à haute dose !
« Toutes les institutions humaines ne sont-elles pas destinées à empêcher les hommes de sentir leur vie à cause de la dispersion constante de leurs pensées ? » Nietzsche
Ces manifestations dispersantes, certains évoquant une stratégie :
+Détournent l’attention des problèmes importants en y incorporant pléthore de distractions et d’informations insignifiantes, par exemple les débats sur l’identité :
A propos de cette préoccupation qui pollue l’atmosphère en fissurant nos réseaux neuroniques, J-Cl Guillebaud évoque le bon sens mélanaisien : «Vous, les Blancs, pensez qu’il faut choisir entre les hommes-arbres (les enracinés) et les hommes-pirogues (les nomades), mais nous savons bien, nous, qu’on fait la pirogue avec l’arbre».
Triste constatation de la responsabilité des «arbres» dans la multiplication des pirogues !
Philippe Val remet les pendules à l’heure, en parlant de «l’identité batarde» des Français dans : «Cachez cette identité que je ne saurais voir» ; il montre qu’au cours de notre histoire ce sont les pirogues qui ont fait les arbres. Attention !
«Un Peuple sans mémoire est un peuple sans avenir.» Aimé Césaire.
Les jeux, les spectacles, le sport , être cool, les soit-disant humoristes, etc., ont un grand succès, font diversion, cultivent l’ignorance, parfois bien portée, distraient le public de l’intérêt d’acquérir les connaissances essentielles pour une appréhension objective et personnelle du monde, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique…..
«L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine
et la haine conduit à la violence. Voilà l’équation.» Averroès.
+Le culte de l’émotion et le matraquage médiatique, amplifient dangereusement le sordide, la nullité des politiques, le drame des 100% du PIB de la dette, les emplois publics parasites. Cette stratégie de la dégradation favorise le désintérêt, la lassitude, voire l’acceptation de l’inacceptable. Le moment est venu de présenter les mesures «douloureuses mais nécessaires»pour aller mieux après !
La grande illusion !
+ On ouvre la voie à la décadence en infantilisant. La publicité fait du spectateur un enfant en bas-âge ou un handicapé mental. De plus, on nous fait croire que nous sommes responsables et coupables de notre malheur ; ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif collectif.
Un esprit pollué dans un corps pollué, ne serait-ce pas de la décadence ?
Les évolutions sociales et surtout technologiques vont beaucoup plus vite que les évolutions biologiques. Le fossé se creuse de plus en plus.
L’homme sera-t-il capable de s’adapter à lui-même ?
Ce décrochage vécu par une majorité doit passer, comme à l’école, par un grand rattrapage basé sur le recyclage par une formation accompagnée prévue à l’avance et par une réappropriation du temps.
Pascal Picq aura le mot de la fin en posant la question de savoir pourquoi les grands singes prennent le pouvoir sur la planète Soror de Pierre Boulle ?
Les humains avaient cessé de se comporter comme tels.
Les machines produisaient ce dont ils avaient besoin et les grands singes, domestiqués, les servaient. Les humains cessèrent d’être actifs physiquement et intellectuellement, incapables de réagir, ils glissèrent de l’esclavage volontaire à la soumission aux grands singes.
Actuellement, on rentre sur la planète des robots, de l’intelligence artificielle, des machines et des algorithmes ;
nous cessons de nous comporter comme des humains,
la décadence de l’humanité est «en marche» !
(Toute allusion avec des réflexions récentes n’est pas exclue.)
Georges Vallet
crédit photos: ddiffusion.com/images/nuisances
ils *(les humains) *glissèrent de l’esclavage volontaire à la soumission aux grands singes. *
La lecture du roman « Soumission » de Michel Houllebecq et la destinée de son personnage principal, m’avaient renvoyé au roman de Pierre Boulle.
Le thème de la décadence accompagne toutes les époques de notre histoire. Il est généralement agité par les conservateurs, voire les ultras conservateurs.
C’est noir, mais il y a du vrai sur ce thème de la pollution.
Parmi les éléments de pollution de l’esprit et de la planète, les catalogues (débiles) de publicités quotidiens contre lesquels les citoyens doivent se protèger en inscrivant sur leur boîte aux lettres « pas de pub, merci », puisque le législateur autorise encore ces aberrations.
C’est un peu comme l’interdiction de fumer dans les bars et restaurants. Il faudra 30 ans de travail acharné de certaines associations pour en venir à bout.
Les incivilités sont une forme de grande pollution sociale également.
C’est irresponsable de publier des articles comme ça sans distribuer en même temps les cordes pour se pendre en suivant…
1°) A la lecture de certaines opinions sur le comportement des élus et sur la gestion des finances publiques, j’ai l’impression que la situation y est presque aussi noire!
2°)Pas de panique, la décadence n’est pas aussi certaine; sur la planète des robots, de l’intelligence artificielle et des algorithmes, on s’en sortira; le Nel Obs de cette semaine dans un article: «Cerveau: du nouveau pour guérir» signale que «addictions, dépression, boulimie, anorexie, Toc… pourront bientôt être soignées par la psychochirurgie grâce à la stimulation cérébrale profonde par deux électrodes implantées dans des zones spécifiques, le noyau accumbens pour la dépression afin de rétablir l’équilibre de la sérotonine.
L’inconvénient est qu’il faudra augmenter les cotisations de la sécu pour permettre le remboursement de ces interventions devenues de plus en plus nécessaires.
3°) J’ai abandonné la distribution des cordes car elles ne sont pas dans mes cordes!
Pour le 1°) il y a une différence notoire : il me semble que les gens qui écrivent sur ces sujets ici préconisent tous (même si ils ne le disent pas forcément à chaque fois) des mesures pour améliorer les choses. De votre côté, une fois faits les constats -que l’on peut parfois partager, c’est le cas ici me concernant-, on a l’impression qu’il n’y a pas d’issue. Quand on veut évoquer des solutions concrètes vous opposez régulièrement la complexité du monde, son caractère systémique, pour disqualifier toute tentative d’amélioration (en dehors d’une révolution, peut-être).
Entre les problèmes liés à la gestion politico-économique locale ou régionale qui sont ceux le plus souvent abordés et ces problèmes généraux comme celui de la pollution, il y a une différence énorme dans l’approche de solutions possibles. Je me demande, par expérience, à la suite de contacts et discussions avec de nombreux amis, si, entre nous, il n’y a pas cette approche très différente entre la formation universitaire et celle de l’ingénieur. L’ingénieur doit résoudre les problèmes les uns après les autres, le plus vite possible, sur le terrain; l’universitaire, de jadis peut-être, au moins celui dont je suis imprégné, voit les choses beaucoup plus en général, dans le temps et l’espace; il doit s’efforcer d’expliquer, démontrer, diffuser; il n’a pas cette obligation de résolution mais de compréhension, d’élargissement, de diffusion des connaissances. Les deux sont indispensables et complémentaires mais je reste convaincu que la résolution du particulier doit passer d’abord par la vision générale. L’écologie illustre parfaitement cette démarche. C’est au politique de s’en imprégner (intérêt d’une formation scientifique) et de proposer ses solutions et à l’électeur de les approuver ou pas.
+Mon objectif, dans mes interventions, n’est donc pas d’apporter des solutions mais de soulever des problèmes généraux, de faire des constats, afin de sensibiliser un lectorat éventuel à l’importance des relations et interactions qui existent et dont il n’a pas forcément conscience, en ce qui concerne les retombées sur la vie en général, d’individuelle à sociétale. Faire prendre conscience c’est déjà commencer à faire réfléchir chacun, donc de stimuler d’éventuelles propositions.
Suivant les sujets, je ne suis pas toujours resté sans solution; ainsi, à propos de la grippe aviaire j’ai dénoncé la méthodologie appliquée, partant du principe que c’est en multipliant les transports qu’on permettait les transmissions. Ce raisonnement semble faire son chemin. Identifier la cause sous-entend proposer la solution.
Si on démontre la toxicité des produits phytosanitaires, des perturbateurs endocriniens, des particules très fines, de la publicité … la solution est évidente!!!
+Puisque la notion de complexité vous dérange et constitue à vos yeux un obstacle à toute action limitée, et que vous voulez me pousser dans mes derniers retranchements je peux vous suggérez quelques propositions qui me viennent à l’esprit.
Non, ma solution n’est pas la révolution mais la transformation, la métamorphose comme disent certains.
Quelques mesures à prendre par les politiques, en désordre, progressivement bien sûr, mais rapidement:
Suppression de la publicité dans tous les domaines, des lobbies, de la spéculation boursière, des sondages, des experts issus d’instituts à compétence autoproclamée, des cabinets d’étude qui sont là pour récupérer de l’argent, utiliser les résultats diététiques pour lutter contre la consommation excessive de viande, lutter contre l’agriculture, l’élevage et la fabrication des aliments, industriellement, freiner la disparition des terres agricoles, redonner à l’agriculture sa mission de nourrir l’homme et non nos moteurs, mettre en pratique une taxe carbone dissuasive, s’opposer au transport par camions sur les longues distances, éradiquer les énergies non renouvelables, dissuader la circulation automobile en ville, favoriser les transports en commun, allonger les temps de pause en entreprise, responsabiliser les acteurs en entreprise au lieu de les manager, inhumainement, taxer les machines….
Ne me dîtes pas que c’est utopique, irréalisable, impossible donc, je le sais, ne me donnez pas d’arguments, je les connais; d’ailleurs un infime pourcentage de la population y adhère.
Alors? Du grignotage est toujours possible mais inefficace; seule la persuasion, l’explication, l’instruction, travail de longue haleine, les initiatives locales nombreuses et efficaces mettant en difficulté le pot de fer, pourront faire évoluer les choses dans le bon sens.
Votre dernière phrase est totalement contradictoire, les « initiatives locales nombreuses et efficaces » étant justement de l’ordre du « grignotage ». En fait il y a le bon grignotage, celui que vous adoubez, et le mauvais grignotage, celui préconisé par ceux qui n’ont soit-disant pas votre hauteur de vue.
Pour moi, cela n’a absolument rien de contradictoire; tout est une question du contenu des mots.
+Les initiatives locales envisagées sont efficaces car elles n’engendrent pas, ou très peu, de pollution. Pour résumer, je pense par exemple à une démarche en pleine extension et de plus en plus rentable, financièrement et humainement, l’agriculture, l’élevage et la production alimentaires biologiques, la permaculture, les marchés et supermarchés bio. Cela devient une part de plus en plus importante comme part de marché, le tourisme est friand de ces produits; la France est très en retard, obligée d’importer. Beaucoup d’agriculteurs, des jeunes surtout, et des urbains stressés, souvent informés, se convertissent mais ont du mal à se procurer des terres; elles sont accaparées par l’agriculture polluante et les activités urbaines. Pour s’en convaincre il suffit de suivre des émissions de télé sur la fabrication du pain, la gastronomies des terroirs, les initiatives régionales dans «des Racines et des Ailes»…..C’est loin d’être du grignotage!
Les opérations de grignotage sont surtout nationales et productrices de pollution, elles en grignotent seulement un peu et ne constituent à aucun moment une solution. C’est une démarche nécessaire sans doute mais sur le très court terme, de survie immédiate; l’état d’urgence en somme!. J’y place l’agriculture raisonnée, a circulation alternée, les pastilles sur les voitures ou les produits de consommation, les indications illisibles sur les produits de supermarchés,…le covoiturage grignote sans aucun doute, la taxation ou l’interdiction du diesel aussi, mais, comme la vente de voitures à essence est en hausse ce n’est pas encore l’idéal pour l’avenir!
De plus, et ce n’est pas négligeable:
Les premières sont vécues avec satisfaction, recherchées par les acteurs et les consommateurs, les secondes se chiffrent uniquement par des contraintes et des inégalités.
Ce n’est donc pas comparable.
Quant à l’allusion à ma « hauteur de vue », ce coup de griffes au contrat de sérénité des échanges n’était peut-être pas une nécessité incontournable, même si je vous énerve.
Donc des mesures nationales -toutes insuffisantes qu’elles soient- sont du « grignotage inefficace », mais des initiatives locales marginales sont du « grignotage efficace ». Logique… Excusez-moi mais il faut avoir la foi pour voir dans le « retour au terroir » ou la fabrication du pain un « grignotage efficace », qui soit autre chose qu’une petite réserve indienne à laquelle les colons ont consenti à accorder un petit terrain de jeu et quelques droits. Pour un « pain terroir » vendu, il s’en écoule 10000 en papier maché en supermarché : à ce rythme de grignotage on n’est pas rendu. Et je vous rappelle que c’est au nom du « terroir » que les éleveurs ovins justifient l’éradication des derniers ours pyrénéens : c’est le genre de terme avec lequel on peut tout dire. Même la progression de l’agriculture biologique cache une réalité pas très terroir, faite d’agriculture certes biologique, certes sans pesticides de synthèse, mais industrielle et intensive quand même, donc avec les défauts qui vont avec.
Quant à mon coup de griffe, c’est quand même bien vous qui mettez régulièrement en avant votre hauteur de vue face à vos contradicteurs -sous-entendu ils n’ont pas la même-, je ne l’ai pas inventé.