Morale ? Vous aviez dit «Morale»! Comme c’est bizarre !

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Cette campagne électorale a eu comme mérite, entre autres, de faire monter, bien momentanément semble-t-il, dans les sondages, une valeur de plus en plus oubliée, voire bafouée dans beaucoup de domaines : le comportement moral. Elle a semblé vouloir privilégier la morale en politique ; un début, on espérait, par la suite, une extension dans le reste de la société ; ce n’était qu’une pulsion émotionnelle passagère qui oubliait l’histoire.

                      Cessez donc de vous plaindre : seuls les fous veulent

Rendre honnête une grande ruche.

Jouir des commodités du monde,

Etre illustres à la guerre, mais vivre dans le confort

Sans de grands vices, c’est une vaine

Utopie, installée dans la cervelle.

Il faut qu’existent la malhonnêteté, le luxe et l’orgueil,

Si nous voulons en retirer le fruit…

……………..

Oui, si un peuple veut être grand,

Le vice est aussi nécessaire à l’État,

Que la faim l’est pour le faire manger.

La vertu seule ne peut faire vivre les nations

Dans la magnificence ; ceux qui veulent revoir

Un âge d’or, doivent être aussi disposés

À se nourrir de glands, qu’à vivre honnêtes.

Extraits de la fable des abeilles : Bernard Mandeville (1670-1733)

Pour l’auteur, dans la ruche aux millions d’habitants, un très grand nombre assurent la prospérité commune tandis que bien d’autres se chargent de valoriser la vanité et l’ambition de certaines abeilles. Le vice imprègne le tout mais c’est « la prospérité heureuse » !

Quoi de neuf au XXIème siècle ?

Comme toute la ruche réclamait une solution, Jupiter, compatissant, envoya une reine pour imposer les normes morales qui feraient de la ruche un exemple de société vertueuse. Le résultat fut la ruine de la société. Les abeilles durent émigrer pour pouvoir survivre.

Pour Mandeville donc, les vices des particuliers sont des éléments nécessaires au bien-être et à la grandeur d’une société. Ceci semble se confirmer actuellement, d’après les derniers sondages, pour 43% des sondés!

Pas franchement réjouissant !
Déjà, à son époque, des juges menacèrent de faire un procès à l’auteur !

Prudence toutefois, si le vice est condamnable, la vertu est fragile ! Revisitons Robespierre et méfions-nous des reines que nos politiques veulent nous proposer !

Jadis Margaret Thatcher disait:«There is no alternative» à la globalisation libérale, à la privatisation des économies, à la montée des injustices»; d’autres prennent le relais actuellement.

Nous vivons dans une société de plus en plus soumise à la loi du marché. Chacun poursuit son intérêt personnel, cultive son égoïsme ; grâce au jeu miraculeux de l’offre et de la demande, l’intérêt de tous sera assuré, nous dit-on. La main invisible y veillera ! Ce ne fut pas le cas de nombreuses fois (dernières crises financières et la prochaine à venir).

Le marché sans morale a produit de l’inégalité en lieu et place du bien commun.

Nous réclamons avec insistance de nos hommes politiques de la vertu civique, voire du désintéressement ; sans aucun doute, une démocratie ne peut fonctionner sans cela.

Mais voilà, nos politiques sont faits à l’image de notre société où la morale est inscrite sur la liste rouge des vertus en danger.
Voilà quels étaient les bonheurs de cet État ;

Leurs crimes conspiraient à leur grandeur,

Et la vertu, à qui la politique

Avait enseigné mille ruses habiles,

Nouait, grâce à leur heureuse influence,

Amitié avec le vice. Et toujours depuis lors

Les plus grandes canailles de toute la multitude


Ont contribué au bien commun.
Une opposition se matérialise dans des face-à-face entre deux mondes :

–  Les importants, les «gens sérieux», cravatés, avec leurs limousines, leur attachés-cases et leurs gardes du corps, les experts… Ils assurent incarner la savoir, la raison, la sagesse, la vision à long terme, le réalisme. Ils se présentent comme des adultes ayant en charge la destinée du monde.

–  Les «ignorants», parfois turbulents, des mouvements associatifs viennent poser des drôles de questions auxquelles les gens sérieux ne savent pas répondre ; par exemple : «Aurions-nous traversé trois siècles de progrès scientifiques et économiques pour aboutir à des sociétés aussi riches, alors que les inégalités s’aggravent, plus dures, plus égoïstes, plus impitoyables à l’égard des faibles ? »

La médiatisation du premier monde est illustrée par les débats entre les politiciens, les émissions économico-financières comme C dans l’Air (et autres) ; celle du deuxième monde se retrouve dans «Carnets de campagne» de France Inter, «Les carnets de Julie», «des Racines et des Ailes», Cash Investigation(pour combien de temps ?) à la télé…….

La réponse des premiers est toujours la même : ce ne sont que des enfantillages, des utopies !

«On ne peut s’empêcher d’être habité par un doute : lesquels, à long terme, au regard de l’histoire, apparaîtront comme les mieux inspirés ? Il arrive souvent que les questions posées par les enfants soient de très loin les plus embarrassantes par leur bon sens. Quand on essaie de réfléchir à ce qui menace le monde, on en arrive très vite à se demander : qui sont finalement les plus enfants ?» J-Cl Guillebaud.

La société vertueuse que l’on revendique serait-elle vouée à la ruine, à l’apauvrisssement, à l’abandon, comme chez les abeilles ? Faudrait-t-il émigrer pour survivre ? Mais où ?

L’écologie, encore elle, ouvre la voie des solutions. Un écosystème durable est un système dans lequel une infinité d’acteurs sont en interrelations et interactions (liberté des échanges) en équilibre du fait d’autorégulations internes et externes (environnementales). Depuis des milliards d’années, cela fonctionne ainsi.

L’économie libérale présente de nombreux points communs avec les écosystèmes vivants ; elle n’est donc pas mauvaise, théoriquement, mais elle doit, pour s’équilibrer, chercher les fondements de son autorégulation, en dehors du mécanisme des marchés. Les écosystèmes sont régulés par l’environnement et non par quelques acteurs privilégiés ou plus puissants ; le marché doit être amendé, corrigé, discipliné par une instance indépendante qui obéit à d’autres priorités que l’intérêt individuel, l’intérêt commun par exemple !

«Tous nous espérons voir à bref délai un âge nouveau, la concorde entre les nations, l’ordre dans les États, l’apaisement religieux, en un mot la félicité d’une vie heureuse et l’afflux de toutes les prospérités».

Un souhait de plus à introduire dans des vœux de Nouvel An ?

Non, c’est la leçon inaugurale au Collège de France prononcée en 1534 par Barthélemy Latomus, un ami du grand Erasme !

On rêvait déjà au début du XVIème siècle !

Signé Georges Vallet

crédits photos:eurojuris.fr

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  • « Personnellement, je ne perçois pas que les inégalités s’aggravent. »
    Cela mérite un approfondissement de votre part!

  • Pour stimuler un peu les échanges.
    Il n’y a a pas que 43% des sondés qui supportent sans problème la carence de moralité!
    je lis dans la profession de foi d’E.Macron: «Voter pour E.Macron , c’est……, interdiction des perturbateurs endocriniens dès lors qu’il existe des solutions reconnues comme moins toxiques……»

    Il est bien évident que l’industrie n’a pas l’intention de chercher des solutions de rechange sans contraintes, ce sont des dépenses inacceptables.
    Du fait de l’ampleur et des sources de leur répartition: plastiques, cosmétiques, pesticides, retardateurs de flammes…, ils n’ont en rien un caractère indispensable et il est tout à fait possible de s’en passer sans chercher des solutions «moins toxiques».
    +Le danger pour l’humanité actuelle et sa descendance, démontré par des centaines de scientifiques est suffisant pour en demander, sans aménagement, la suppression.
    Bilan:
    La morale, qui s’intéresse au bien et au mal, vise d’une part à la conservation des formes collectives d’organisation sociale, de la société, de l’intérêt général, d’autre part à l’agrément de la vie des individus en société.(wikipedia)

    +Accepter, si on ne trouve pas de solution de rechange, le maintien des perturbateurs endocriniens dans le commerce.
    +Accepter si on en trouve de les remplacer par des substances toxiques moins dangereuses,

    c’est accepter le Mal, c’est perturber l’organisation sociale, l’intérêt général, au profit du particulier, c’est une atteinte à l’agrément de la vie…c’est donc bien un engagement de comportement contraire à la Morale.

  • N’y a-t ’il pas autorégulation ? N’est-ce pas une question d’échelle de temps ? On verra dans cent ou… mille ans. Personnellement, je ne perçois pas que les inégalités s’aggravent.
    Je reçois souvent des messages transférés par des amis. Le dernier concerne le bureau de Napoléon III au Palais du Luxembourg, aujourd’hui occupé par M. Larcher. Un privilège, voire un scandale. Si c’est exagéré de nos jours, comment fallait-il le considérer sous le IIe Empire ?
    Nous pensons que nous sommes toujours à l’aube d’une nouvelle révolution. Les pays sont un peu comme les ânes. Lorsqu’ils ont réussi à se libérer une fois du licol au moment du dressage, ils essayeront toute leur vie de se libérer. Je pense que la gauche française en est là.

    Il y a plus d’une semaine que je n’écoute plus l’actualité politique. Vivement dimanche.
    Je vis en milieu rural, marqué par la périurbanisation. Je connais les gens qui ont des difficultés. Je connais aussi des gens qui sont raisonnables dans leurs modes de vie et également des gens qui vont très bien.
    J’ai été surpris (mais sans plus compte tenu de l’offre locative dans le village) de voir dans le « Projet de territoire de la CCLO que mon village était au niveau de Mourenx pour le chômage.
    Il y a quelque mois, j’avais essayé de quantifier ces situations. Trop délicat. Je suis malheureusement resté qualitatif.
    Rappel de quelques réflexions que, je pense, j’ai déjà plus ou moins diffusé pans A@P :

    « Les modes d’habiter dans les espaces périurbains, tels que décrits par Rodolphe Dodier par exemple, se retrouvent dans le village. Trois modes d’habiter principaux, correspondant à des pratiques différentes de l’espaces périurbain, sont identifiables :
    Le milieu de l’échelle sociale est constituée de figures dites équilibrées », c’est-à-dire de personnes qui vivent assez bien leur condition périurbaine. Elles forment une grande majorité de résidents (près de 80%) et s’approprient les usages locaux ainsi que l’espace périurbain mais de manière différenciée suivant les catégories socioculturelles (villageois, navetteurs ou périphériques) .
    Le bas de l’échelle sociale est constitué de figures dites de souffrance, c’est-à-dire de personnes qui ont une intense présence dans le logement et une fréquentation d’autres espaces limitée voire nulle. Cette minorité (autour de 10%) se répartie en trois groupes (reclus, repliés, captifs) .
    Le haut de l’échelle sociale est constitué de figures dites métapolitaines. Cette autre minorité (plus de 15%) évolue dans un espace géographique très large (hypermobiles, absents, multicompétents) .

    Ce type d’évaluation, basée sur des éléments objectifs, fait généralement l’objet d’enquêtes. Il permet de représenter les niveaux de vie, les modes vie et les genres de vie et de suivre quantitativement leur l’évolution.
    Compte tenu des tendances socioéconomiques actuelles, c’est-à-dire l’avancée du « libéralisme », les modes d’habités situés aux extrêmes de l’échelle sociale, devraient augmenter.
    La différenciation des modes d’habiter du milieu de l’échelle sociale majoritaire devrait s’accentuer en raison de l’arrivée de nouveaux résidents ainsi que de la diminution du nombre d’agriculteurs et du vieillissement des familles issues du monde agricole.
    Cette évaluation des modes d’habiter est à comparer avec les jugements traditionnels qualitatifs des modes d’habiter, toujours de mise en cette période où le chômage et l’immigration sont importants.

    Les modes d’habiter traditionnels déterminent également trois catégories d’habitants : Les « vaillants », les « privilégiés » et les « fainéants ». Parmi les « vaillants », on trouve ceux qui travaillent dur et qui sont organisés, ceux qui entreprennent et qui réussissent. On trouve aussi ceux qui survivent à condition d’avoir un beau jardin ou un beau verger. Ces gens sont représentatifs de la vraie vie. Ils ne boivent pas, ne fument pas, ne fouettent pas les chats et ne bénéficient jamais de subventions. Parmi les « privilégiés » on trouve les gens qui ont fait des héritages, les fonctionnaires ainsi que les salariés de grandes entreprises. Ces gens ne sont donc pas représentatifs de la vraie vie. Quant aux bénéficiaires d’aides sociales, ils sont forcément classés comme « fainéants ». Dans cette catégorie pourraient éventuellement figurer les chasseurs et les pêcheurs non affiliés à Chasse Pêche Nature et Tradition.
    En période de crise, ce classement cautionne implicitement des solutions radicales. Elles ne seraient pas démenties par les ultralibéraux, ultralibertaires, ultranationalistes, ultraconservateurs ou ultratraditionalistes. Ils finissent toujours par trouver des boucs émissaires pour s’entendre. »