Marchons, marchons !
Mais de grâce, n’abreuvons pas nos sillons d’un sang considéré comme impur. Pour une mère, pour un père, le sang de son enfant n’est pas impur. Je suis de ceux qui aimeraient bien substituer à ce chant de guerre un hymne plus pacifique, même si cette antienne évoque tant de moments forts de notre histoire (*). Bien sûr, il y a d’autres priorités (**).
La première est la lutte contre le chômage. On ne peut redresser le pays avec 10% de chômage. C’est une plaie pour les finances publiques, les cotisations sociales et c’est une souffrance pour les personnes touchées et leur entourage. La nouvelle donne est porteuse d’espoir. Mais l’espoir ne suffit pas. « Charlie hebdo », avec sa dérision habituelle (teintée cette fois de bien mauvais goût) montre une Première Dame enceinte en parlant de miracles. Les Français n’attendent pas de miracles ; ils attendent des mesures efficaces. Ils attendent que l’inspirateur du CICE demande des comptes au patronat qui avait promis un million d’emplois nouveaux.
Ils attendent aussi que les travailleurs d’une entreprise en difficulté soient aidés pour trouver des repreneurs ou pour reprendre eux-mêmes leur outil de travail. Ils attendent surtout qu’un meilleur dialogue social soit instauré. Des germes sont présents et si d’autres peuples y parviennent, le nôtre devrait aussi pouvoir y parvenir. La décomposition des grands partis, leurs fractures ou leurs lézardes montrent à l’évidence qu’une plus grande écoute, une plus grande tolérance est nécessaire. Les sans-emplois n’ont guère de moyens de défense collective. Mais ils doivent être entendus des salariés et des syndicats comme des patrons et des actionnaires. Des limites peuvent être imposées à la recherche du bénéfice maximal, comme des limitations doivent être imposées aux indemnités pour perte d’emploi si celles-ci menacent la survie d’une entreprise. L’optimisation fiscale doit être jugulée au sein de l’Europe. C’est une des raisons pour lesquelles une Europe forte est souhaitable. Mais ce n’est pas la seule. Une protection des frontières communes s’impose et il n’y a pas de raison que la France supporte un effort en matière de défense plus important que celui des autres pays européens.
De nouvelles attentes en matière de fonctionnement de la vie politique, de probité dans la vie publique sont nées. Elles ne doivent pas être déçues. Les nuits debout comme les assoupis peuvent éclairer les marcheurs et éviter au pays des conflits ravageurs.
Paul Itaulog
(*) On pourrait aussi mettre en valeur et en usage ces paroles de la Marseillaise si ignorées :
Français, en guerriers magnanimes
Portez ou retenez vos coups
Épargnez ces tristes victimes…
Cela pourrait aussi valoir dans les stades !
(**) Malgré des fautes généralisées d’accords de participes que l’on constate sur tous les médias, il est douteux qu’une majorité de Français range parmi les priorités une simplification de la grammaire et de l’orthographe, sujets quasi-religieux. Mais une telle simplification aurait sa place parmi d’autres plus pressantes dans notre maquis de règles et de codes.