A ce train là

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A ce train là il ne devrait pas rester en France beaucoup de grandes entreprises industrielles appartenant à des Français à la fin du quinquennat.

Des pans entiers de grands groupes ont déjà disparu de l’escarcelle française (Arcelor, Alcatel, Lafarge…). Certes, c’est la loi du marché que d’acheter et vendre. Mais il y a une différence entre l’acquisition de fleurons de notre industrie et l’achat de petites entreprises. Alstom, c’est notre TGV et notre fierté. L’entreprise travaille pour un mode de transport écologique, le train (alors que 90.000 camions arrivent chaque matin à Rungis et que l’avion ne fait guère gagner de temps sur les vols intérieurs et est coûteux en carburant). Déjà exsangue après la cession de la branche énergie, l’entreprise n’est pas sur un pied d’égalité avec Siemens. Les dividendes iront vers l’Allemagne et ce n’est ni la nomination d’un Français à sa tête, ni la localisation de son siège en France qui seront des remparts suffisants contre les pertes d’emplois. D’ailleurs, c’est sous la présidence de Patrick Kron que l’entreprise est passée au début des années 2000 de 110.000  à 65.000 salariés.

De plus, on sait ce qu’il en est des promesses : les 1000 emplois promis à Alstom Energie se sont traduits par 1200 postes supprimés. Et la montée de 10,4% du cours de l’action d’Alstom cinq jours après l’annonce de l’accord est peut-être un indice indicateur dans cette direction.

Y aura-t-il un sursaut pour faire profiter les finances publiques de la plus-value qui se présente, ou pour offrir aux investisseurs français une part du capital qui rééquilibrerait l’opération ? Car elle n’est pas équilibrée. Il ne s’agit pas de la création d’un Airbus ferroviaire. Il ne s’agit pas d’un renforcement d’Alstom mais d’une prédation. D’autres entreprises ferroviaires, y compris régionales (à Bagnères de Bigorre, par exemple) auraient pu se joindre à un consortium inter-européen. A Tarbes, les 620 salariés suivront avec attention l’opération.

Sa quasi-simultanéité avec la fusion entre les chantiers navals de STX et Fincantieri frappe l’opinion. Il y a quelques mois la classe politique exprimait son opposition à cette fusion et sa crainte de voir un groupe chinois accéder à une technologie et des savoir-faire que nous
maîtrisons. On nous clamait que l’entreprise avait du travail pour des années. Aujourd’hui on prête 1% du capital aux Italiens pour qu’ils aient la majorité. De qui se moque-t-on ?

Nous ne comprenons pas. Seule une interprétation se glisse comme vraisemblable. M. Macron veut apparaître comme le parfait libéral au sein de l’Europe. Pour conforter son projet européen il est prêt à lâcher du lest. Le « lest » risque fort d’être notre visibilité sur la scène économique mondiale et les emplois de demain.

Ne faudrait-il pas réagir : acheter des parts, écrire à nos députés, lancer une pétition, manifester…

 

Paul Itaulog

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8 commentaires

  • Dans un autre registre, vous trouverez via les 2 URL suivantes, des éléments de réponses quant à la lutte pour la compétitivité de la France ainsi que sur la compétence économique entre régions à l’heure de l’internationalisation (Données financières générales et les grandes politiques régionales » avec entre autres exemples : « Les priorités régionales »…).
    1) « INSEE : recherche et développement en 2014 : comparaisons régionales » (Chiffres-clés)
    Date de publication : 05/10/2017
    URL INSEE : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2012678#tableau-TCR_058_tab1_regions2016
    2) « Régions de France : les chiffres-clés des régions, édition 2017 » : « A l’occasion de son Congrès 2017, Régions de France publie l’édition 2017 des chiffres-clés régionaux. Cette mine d’informations de 44 pages sur nos 18 Régions et Collectivités territoriales est organisée en deux parties, les données financières générales et les grandes politiques régionales. »
    Date de publication : septembre 2017
    URL Régions de France : http://regions-france.org/actualites/actualites-nationales/ledition-2017-chiffres-cles-regions-disponible/
    Nota : document et étude en téléchargement au format .pdf (42 pages)

    • « Dans un autre registre » ?
      A vrai dire, j’ai du mal à voir le rapport entre l’article de M. Itaulog et le commentaire de M. Contrucci.

      • Au « Sieur » Marc : effectivement par une simple lecture, mon commentaire a peu de rapport avec l’article…
        En fait, il y a une réalité : la compétition économique que certains appellent la « guerre économique » (entre pays mais aussi entre régions en France : bataille pour l’emploi via l’attractivité pour les investisseurs…); il y a aussi la réalité de la…réalité illustrée, entre beaucoup d’autres, par ces 3 articles + le baromètre EY « Baromètre de l’attractivité de la France 2017 » qui indique que la France reste sur la bonne voie même si il y a encore beaucoup d’efforts à faire (Veuillez svp excuser cette généralité !) :
        1) Article de Frédéric Schaeffer, le 26/09 (Les Echos) : « CRRC, l’ogre chinois qui a poussé Alstom dans les bras de Siemens » : « L’équipementier ferroviaire chinois CRRC est à l’offensive à l’international, mettant en avant ses prix, ses moyens financiers et la localisation d’usines chez les pays clients. »
        URL : https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/030617486833-crrc-logre-chinois-qui-a-pousse-alstom-dans-les-bras-de-siemens-2117205.php
        2) Article publié le mardi 26 septembre 2017 à 6h00 par France Inter avec agences : « Alstom-Siemens : face à la Chine, l’Europe joue son va-tout sur la grande vitesse » : « Les groupes français et allemands devraient acter une fusion ce mardi et donner naissance à une entité capable de concurrencer le géant ferroviaire chinois CRCC »
        URL : https://www.franceinter.fr/economie/sans-bombardier-la-fusion-alstom-siemens-peut-elle-assurer-la-survie-de-la-grande-vitesse-en-europe
        3) Article de Henry Lauret, publié le 27 septembre 2017 (Le Télégramme) : « Alstom. Le spectre d’un nouveau fiasco » : « Alstom et Siemens ont officialisé, ce mardi soir, le rapprochement de leurs activités ferroviaires. Une union qui vise à doubler de taille pour peser sur un marché dominé par le géant chinois CRRC. Le gouvernement s’est voulu rassurant mais ce passage sous pavillon allemand signifie, de facto, la fin d’un fleuron industriel et suscite des inquiétudes pour l’emploi en France. »
        URL : http://www.letelegramme.fr/economie/alstom-le-spectre-d-un-nouveau-fiasco-27-09-2017-11678959.php
        4) Baromètre EY : « Baromètre de l’attractivité de la France 2017 » : « L’année 2016 a été marquée en France par une forte augmentation des implantations et des extensions annoncées par les investisseurs étrangers (+30 % par rapport à 2015). Les 779 projets annoncés ont permis la création de 16 980 emplois (+24 %). »+ « Le site France est mieux reconnu par les investisseurs ».
        URL : http://www.ey.com/fr/fr/issues/business-environment/ey-barometre-de-l-attractivite-france-2017
        Comme à mon habitude, je n’ai pas la prétention de faire des commentaires sur des commentaires, sur des articles ou des rapports, la simple lecture de ces derniers suffit à cerner, même à minima, la… problématique.

  • Après la lecture de cet très intéressant texte et le partage du même ressenti, j’ai dépassé un peu le côté émotionnel pour me pencher sur une réalité plus objective du phénomène. Je livre aux lecteurs, parmi beaucoup d’autres, deux productions qui ont retenu plus spécialement mon attention.
    La nationalité des entreprises en Europe | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2006-2-page-41.htm
    de S Matelly – ‎2006
    Non, les groupes étrangers ne font pas main basse sur les entreprises …
    https://www.capital.fr › Économie et politique
    D’autre part, il ne faudrait peut-être pas oublier qu’une grande majorité des français a amené au pouvoir, depuis de nombreuses années, des élus favorables à l’épanouissement de la liberté des marchés, du libéralisme, des dénationalisations, de l’affaiblissement du pouvoir public au profit du privé…..; la situation actuelle n’a rien de surprenant; jadis, un rédacteur, devenu muet, disait qu’on avait les élus qu’on méritait!; elle est dans la continuité de la gestion nationale, européenne, mondiale. Dans ce contexte, la nationalité devient une espèce en péril où les hybridations, les mutations, les migrations…..font évoluer en permanence un pool génétique sélectionné par le milieu socioéconomique mondial.
    Je reprends l’introduction du premier texte proposé par Cairn.info
    «Qu’est-ce qu’une entreprise nationale? La question paraît incongrue dans un monde qui se veut global et où les entreprises se revendiquent comme des multinationales. En outre, quels sont les critères qui permettent de définir la nationalité d’une entreprise: l’origine de ses capitaux? La localisation de son siège social? La localisation des emplois? Son marché dominant? La langue utilisée?

  •  »offrir aux investisseurs français une part du capital qui rééquilibrerait l’opération » . Excellente idée, surtout que des actionnaires français ne chercheraient pas à tout crin une mise en concurrence des lieux de production, une délocalisation des usines ou le transfert du siège social à Amsterdam, à Londres ou à Dublin.
    Mais idée qui vient bien tard. Comment changer les esprits dans notre pays, où les dirigeants politiques n’ont aucune expérience personnelle de la gestion et des fins de mois d’une entreprise si petite soit-elle, où l’enseignement de l’Education Nationale ignore tout de l’entreprise commerciale mais vitupère le capitalisme , où les dirigeants syndicaux estiment qu’être actionnaire de sa société c’est avoir un intérêt commun (l’horreur absolue) avec celui du patron?
    Et puis tout est fait pour attirer des actionnaires étrangers dans nos entreprises: pour eux les retenues ne peuvent dépasser 20% sur les dividendes de leur capital investi en France. Par contre pour le Français qui touche un dividende c’est IRPP + retenues sociales, donc pour un tout petit  »capitaliste » qui a pris un risque sur son capital une ponction() allant de 35% jusqu’à pratiquement pas de limite s’il paye de l’ISF.
    Sans négliger l’ignorance de nos dirigeants, nourris à la vulgate marxiste, pour le financement des entreprises d’un monde ouvert à la concurrence, ni leur mépris envers les actionnaires privés français qui est bien là. On se souvient ‘l’investissement en actions n’est pas fait pour la veuve de Carpentras » comme certains disaient au moment des privatisations.
    (
    ) M Macron veut passer à un taux unique la Flat Taxe de 30%; attendons pour voir si ça sera un mieux .

  • Merci Paul de cet article bienvenu sur cet incroyable scandale d’État auquel les Français, hélas, assistent sans broncher depuis 30 ans comme les vaches qui regardent passer les trains.
    Les Français sont des veaux disait le Général; Que dirait-il aujourd’hui devant le massacre de l’industrie française à laquelle il avait lui même consacré beaucoup d’efforts pour la rendre digne d’un grand pays.
    Durant les seules dix dernières années, nous avons perdu nos positions dans plusieurs secteurs stratégiques, qu’il s’agisse de l’aluminium (Pechiney), des équipements électroniques (Alcatel), de la sidérurgie (Arcelor), de la construction navale (chantiers de l’Atlantique) et de la production d’énergie (branche énergie d’Alstom achetée par GE). Les conséquences en sont désastreuses pour l’indépendance nationale, le commerce extérieur et bien sûr et surtout l’emploi.
    La prise de contrôle par l’allemand Siemens de ce qui reste d’Alstom s’inscrit dans le même mouvement. Les années de recherche et d’innovation d’Alstom vont être perdus au profit de ses concurrents directs et c’est ICE qui gagnera contre le TGV. L’Airbus ferroviaire n’est qu’un leurre, on s’en apercevra très rapidement devant la puissance de l’industrie allemande.
    La classe politique au pouvoir, asservie au capitalisme financier, qui n’a ni frontières ni d’états d’âme, continue sa politique de liquidation de l’industrie française, avec pour seule mot d’ordre la recherche du profit maximum. Macron, l’héritier, porte une lourde responsabilité dans la poursuite de cette déroute nationale.

  • Il ne faut pas en vouloir à Emmanuel Macron de cette situation. Le temps politique et le temps industriel ne sont pas réglés sur la même horloge.Il n’ est que l’ héritier d’ une politique qui a commencé à se mettre en place au moment de la crise pétrolière des années 1975. A cette crise, s’ est ajoutée la mondialisation, avec de plus une vision française de ne plus former de compétences professionnelles. Car après 1968, le travail était considéré comme avilissant. Cela dans un contexte de forteresses syndicales, ce qui a amené les responsables politiques, de gauche et de droite, à faire le choix de faire rêver les salariés en leur promettant qu’ un jour ils ne seraient plus des ouvriers en
     » bleus » mais des ingénieurs en blouses blanches. Cela viendra peut être un jour, mais pour l’ instant il faut toujours mettre les mains dans le cambouis…..
    Cela s’ avère un échec total et aujourd’hui’ hui nous sommes nos propres victimes de cette période de désaffection pour les métiers manuels. Amener un opérateur machine, à l’ autonomie professionnelle demande des années. Aujourd’ hui les compétences ne sont plus là, par contre la compétivité n’ attends pas leur retour, on va la chercher ailleurs.
    Les Allemands, entre-autre, ont toujours formé des compétences professionnelles aujourd’hui’ hui ils en récoltent le bénéfice.
    Maintenant nous sommes au point où l’ on ne peu plus masquer cette situation et les masques tombent brutalement. Le monde de l’ entreprise est un monde très complexe où se croisent de nombreux intérêts, économiques, humains, politiques, professionnels, syndicaux, techniques etc… La moindre erreur de gestion de politique industrielle engendre très vite des conséquences qu’ il est très difficile de corriger dans ce monde
    d’ hyper compétivité.

    • Si l’origine de la crise actuelle coïncide bien avec la crise pétrolière de 1975, je pense que le mépris pour le travail manuel a des racines plus anciennes que mai 68.
      Sous la IIIeme République et son école laïque, le savoir intellectuel était primé.
      Déjà au temps de Louis XIV, le gentilhomme était sensé tout connaître. Plus simplement, la noblesse n’était active que dans quelques secteurs productifs.
      Mais cette distance vis-à-vis de l’activité n’est certainement pas propre à la France. Je me souviens du roman d’un auteur égyptien qui décrit une société où l’oisiveté est très présente.
      J’ajouterais qu’il me parait paradoxal que les français consomment toujours plus alors que l’activité productive classique n’arrête pas de sombrer. Les français consomment à l’insu de leur plein gré sans doute.
      Avec des finances publiques en berne, je ne vois pas ce qu’il y a de mieux à faire pour Alstom. Alors que le château brûle, nous ne voyons que le feu dans les écuries.