La succession halliday

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L’argent, toujours l’argent, a au moins pour mérite d’animer les conversations, et le testament du défunt chanteur ne va pas manquer d’alimenter quelques soirées. Nous allons en entendre parler, peut-être, pendant des années, la presse people nous injectant régulièrement des piqûres de rappel.
Et pourtant les choses sont simples.
Johnny HALLYDAY a choisi de léguer tous ses biens à son épouse par un testament rédigé en Californie qui, s’il est conforme à la loi de cet État, contrevient au droit français qui ne permet pas de déshériter totalement ses descendants qui bénéficient d’une portion réservée.
Dans une décision du 27 septembre 2017, la cour de cassation a reconnu la validité d’un testament rédigé en Californie contenant des dispositions identiques, en considérant qu’elles n’étaient pas contraires à la loi nationale, sous la seule réserve que leur application ne laisserait pas les descendants majeurs au jour du décès de leur père, dans une situation de précarité économique ou de besoin.
Cette disposition pose au moins deux problèmes à savoir :
1° sur quels critères objectifs les juges pourront-ils se fonder pour limiter les conséquences de l’exhérédation des descendants que le droit français ne reconnaît pas ?
2° comment fixeront-ils la part qu’ils estimeront devoir aller à l’héritier nécessiteux ?
Mais en supposant que telle ne doit pas être la situation des enfants légitimes de Johnny HALLYDAY, le problème consistera donc de savoir si le testament rédigé en Californie peut-être mis en œuvre et pour cela de déterminer où était domicilié son auteur.
En effet, selon l’article 720 du code civil «  les successions s’ouvrent au dernier domicile du défunt ».
Sans doute la question fera-t-elle l’objet de développements plus savants mais le point de départ du débat est là.
Selon l’article 102 du code civil «  le domicile de tout français (et le défunt l’était), quant à l’exercice de ses droits civils (parmi lesquels le droit de tester), est au lieu où il a son principal établissement.
Il appartiendra donc aux juges du fond (en fait la cour d’appel de Paris)de dire où le défunt était domicilié et leur appréciation étant souveraine la question ne devrait pas être contrôlée par la cour de cassation, sauf erreur de droit manifeste.
Quels sont donc les éléments caractérisant le lieu du principal établissement ?
Le premier est généralement l’installation durable dans un lieu de résidence, mais il n’est pas le seul. Tel était le cas de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 27 septembre 2017 où le défunt était installé et marié en Californie depuis des dizaines d’années sans aucun rattachement en France.
La jurisprudence retient aussi l’installation professionnelle, le lieu du paiement des impôts, des déclarations de l’intéressé (qui a dû passer divers actes notariés indiquant sa domiciliation), de son inscription sur les listes électorales , mais aussi ses attaches familiales et affectives qui se situaient évidemment en France où vivent ses enfants.
Et on peut d’ores et déjà retenir qu’il sera soutenu queJohnny HALLYDAY est décédé et surtout, belle preuve de son attachement sentimental, qu’il est inhumé en France.
Nul ne sait encore ce qu’il adviendra, mais on peut penser que la sagesse l’emportera quand la bénéficiaire du testament mesurera l’importance de ce qui lui restera après la participation de ses beaux-enfants à la succession de leur père.
Les juges ne seront pas être insensibles au fait que ces derniers seraient privés de tous leurs droits dans une succession dont l’importance n’échappera pas à leur regard.
L’équité toujours sous-jacente dans les décisions de justice fera sans doute pencher la balance vers eux.

Pierre ESPOSITO
Docteur en droit
Avocat honoraire.

Crédit photo : lorthios-avocat.fr

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3 commentaires

  • enfin un commentaire clair qui pose les difficultés en la matière sans esprit partisan.

  • Merci Maître pour cette analyse fouillée de la succession de Johnny, qui ne laisse évidemment pas les Béarnais indifférents. J’espère que vous nous tiendrez au courant des développements, car il ne faut pas compter sur la presse généraliste pour avoir de bonnes informations.
    Que penser de Laetitia dans cette histoire ? Est-ce elle la manipulatrice, ou bien est-elle elle-même manipulée par des gens qui auraient intérêt à ternir la mémoire de Johnny ?

  • petite question :
    si la succession est « californienne » qu’en est-il des des droits de succession ?
    Je me sens un peu « déshérité » …
    Pierre Lafon.