L’affaire LAMBERT, nouvelle affaire DREYFUS ?
Les débats électoraux, pourtant d’actualité, ont certainement moins passionné que la triste « affaire LAMBERT » qui, les heures passant, voient se multiplier opinions et réflexions. Pour les uns Vincent LAMBERT vit, pour d’autres il est maintenu en vie.
La question essentielle pourrait être : » qu’est-ce que la vie » ? Est-ce que c’est seulement respirer par soi-même ou pouvoir exprimer des sentiments de joie ou de peine, exprimer de l’amour et de la reconnaissance à ses proches ? En conclusion, Vincent Lambert est-il soigné (sans espoir de guérison ou d’amélioration semble-t-il) ou simplement maintenu en vie ?
Deuxième question : peut-on imaginer, comme dans certains pays, que dans pareille situation, la fin des soins soit autorisée par le conjoint du patient ou à défaut ses enfants (avec un risque de désaccord) et enfin ses parents (avec le même risque ).
La genèse viendrait peut-être aider ceux qui se réclament de l’Eternel dont il est bon ici de rappeler l’injonction « l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme et ils deviendront une seule chair ».
Même en désignant celui qui pourrait décider le problème ne serait pas forcément résolu car les opposants pourraient toujours soutenir que leur fils, leur frère ou leur conjoint n’est pas en fin de vie… notion juridiquement indéfinissable même si c’est une vie végétative. On devrait se contenter alors d’abréger les souffrances du patient. Mais quand les soins suppriment toute souffrance, il n’y a plus qu’à attendre la défaillance cardiaque.
On pourra épiloguer indéfiniment sur la notion de fin de vie !
Faudrait-il cependant renoncer aux données scientifiques et transformer le débat en une querelle idéologique ou philosophique qui paraissait résolue avec la loi Leonetti dont on perçoit aujourd’hui les limites.
Pierre ESPOSITO
Et si on faisait confiance à la science et au bon sens ?
De nombreuses commissions de médecins ont confirmé que Vincent Lambert n’avait aucune conscience, était en fait dans un « état végétatif chronique irréversible ».
Des décisions importantes, les médecins en prennent tous les jours et c’est leur métier.
Pourquoi n’y a t il pas autant de médiatisation lorsque des médecins choisissent de traiter tel ou tel patient (en fonction de son age souvent) avec les derniers médicaments efficaces mais vendus à des prix exorbitants ? Ou bien d’autres choix tout aussi importants.
Pourquoi aucun media ne pose le problème du coût exorbitant du traitement de M Lambert ? (Aïe pas politiquement correct…)
Ceci ne serait il pas mieux utilisé par ailleurs ?
Monsieur Esposito, vous touchez l’essentiel.
Une première réponse à vos interrogations, la plus facile. Vous êtes avocat, je crois, donc vous allez en saisir très vite la portée : le tuteur légal de ce monsieur est sa femme.
Avez-vous lu l’Arrêt de la Cour d’Appel de Paris ? Je le considère comme un un grand Arrêt. Non parce qu’il est de morale, quelle qu’elle soit, mais parce qu’il est de Droit : le Droit à la vie « attribut inaliénable de la personne humaine ». Il va bien au-delà dans son fondement juridique que l’Arrêt du Conseil d’État. Il accorde en outre aux parents Lambert l’ »intérêt à agir » contre l’État, non en tant que représentants de leur fils mais en leur nom propre car il consacre la « voie de fait » sur une personne handicapée au sens de la Convention Internationale des Droits des Personnes Handicapées (au sens de cette convention, Monsieur Lambert n’est pas en fin de vie). En signant cette convention, estime la Cour, la France s’est engagée à suivre les avis du Comité. Et donc elle doit attendre que l’avis soit donné.
Et là, je me pose la question à laquelle vous répondrez mieux que moi : si l’avis du Comité était que, en effet, il y a atteinte à la vie de la personne handicapée, cela serait-il de nature à rendre inconstitutionnelle la Loi Claeys-Leonetti de 2016, car portant atteinte à la première Liberté fondamentale, le droit à la vie ?