Villes moyennes, territoires et mondialisation
Les trajectoires contrastées des villes mettent au défi les recettes classiques de développement pour affronter l’avenir (1). Le constat que le modèle hiérarchique des villes est devenu obsolète est largement partagé. Un autre modèle d’organisation territoriale.se met en place y compris à l’échelle locale.
Un historique de l’organisation territoriale, cf. (1) par exemple.
Le
modèle hiérarchique des villes est devenu dominant après le
deuxième Empire. Il a prospéré sur plus d’un siècle, à l’écart
des métropoles (Paris, Lyon par exemple) considérées comme
suspectes.
Dans le même temps l’exode rural a accompagné
cette situation avec notamment au milieu du XXe,
à la fin du modèle rural autarcique, la disparition de la
bourgeoisie rurale (cf. origines revendiquées de M. Juppé par
exemple).
Je me souviens de
mon arrivée dans une classe de 6ème
au Collège Classique et Moderne d’Orthez. J’ai alors pris
conscience de la réalité des élites et notamment protestantes
dont les enfants constituaient une proportion importante de la
classe. J’ai ainsi découvert la réalité du protestantisme
avant de découvrir bien plus tard, celle du judaïsme voire de
l’islam.
Depuis
les années 1980/90 les villes petites et moyennes sont, pour
beaucoup, dans une phase de déclin.
Ainsi
la bourgeoisie locale n’a plus «pignon sur rue ». Se
souvient-on vraiment que des noms de notables tel Moutet et
Destandau à Orthez ou Sallenave à Pau étaient associés aux
tissages, à une minoterie ou à une droguerie?
« Actuellement,
l’aménagement du territoire ne peut plus se résoudre à définir
les périmètres prioritaires qu’il faudra remplir de gares, de
zones d’activités, d’universités ou de parcs de loisirs ».
Le modèle d’une ville basée sur le commerce serait même périmé
(Voir note 2).
Même
le sacrosaint « désenclavement » ne fait pas de
miracles.
Organisations territoriales en perspectives.
En
fait nous sommes devenus mobiles et l’aménagement nécessaire
correspondrait à des réseaux, des relations, des lignes au
long desquelles nous déroulons nos vies nomades.
Il faudrait
« donner envie de rester mais aussi accorder les moyens de
partir et de revenir; proposer des ressources pour d’autres venus
d’ailleurs» (1).
C’est du reste ce qu’offrent les métropoles à l’échelle
mondiale.
La mondialisation
n’est pas uniformisation. «C’est d’abord une
fragmentation des filières et un maillage des territoires autour de
pôles («hubs» et «écosystèmes»).
En plus nous sommes
engagés, que nous le voulions ou non, dans une course- poursuite
technologique et mondiale permanente» (2).
Le destin des métropoles et des périphéries est lié. «L’idée d’un développement métropolitain hors-sol, tout entier orienté vers la mondialisation et tournant le dos aux territoires périphériques, doit être remise en cause» (3). D’ailleurs les flux financiers des métropoles vers les territoires sont majeurs.
En
fait «le tournant local de notre société est déjà engagé
positivement avec notamment une dimension écologique : Recréer
de la valeur locale dans les chaînes d’activités au lieu de
figurer simplement comme point de départ, de transit ou d’arrivée
de flux logistiques» (2).
Exemples
de tournant local.
Un article de M. Mazoyer, Président du Crédit Agricole Pyrénées-Occitanie, indique en s’appuyant sur le local que l’innovation n’est pas l’apanage des grandes métropoles (4). L’innovation doit irriguer tous les secteurs de l’économie et ne se réduit pas (ou plus) à certains domaines d’activité (i.e. filières).
Les
circuits courts qui se multiplient, illustrent ce tournant à échelle
locale. Curieusement, j’ai perçu ce tournant à Lourdios-Lichères,
patrie de M. Lassalle, lors de la fête de la transhumance.
La
matinée a été dominée par le défilé des troupeaux accompagné
des commentaires d’un speaker particulièrement zélé pour
défendre le pastoralisme dans sa forme traditionnelle (les
subventions sont amplement méritées et ne devraient pas prêter à
discussions ; «il faut arrêter avec ça». L’ours est une
menace par exemple).
Après un repas agrémenté de quelques
prestations de M. Lassalle, l’après-midi a été consacrée à la
projection du film « des brebis et des femmes » de Laurence
Fleury (5) :
Une présentation d’un pastoralisme rénové par de nouveaux
arrivants dont des femmes et qui bouscule les traditions.
M.
Lassalle n’avait certainement pas imaginé que la relève du monde
pastoral prendrait cette tournure. Apparemment il s’approprie sans
peine cette révolution, actuelle et positive, du monde pastoral qui
n’est qu’une facette de la nouvelle révolution industrielle qui
secoue la planète.
Cette révolution industrielle (numérique, IA et VIème du genre) que l’on souhaiterait mieux contrôlée, est inarrêtable. Elle n’attend pas après nous.
Larouture
Crédit
image :
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/a/a0/EAMC_056_-_mappe_monde_carte_universelle_de_la_terre.png
Note 1 :
A Nantes, l’échec d’Alain
Chénard aux élections municipales de 1983 s’explique pour une bonne
part par les polémiques sur le tramway. Son successeur, Michel
Chauty, termina la première ligne alors qu’il avait axé sa
campagne électorale sur l’arrêt des travaux (voir wikipédia par
exemple).
A Bordeaux, M. Juppé a souffert du même problème
lors de sa première réélection.
Toulouse aurait opté pour le
métro car sa construction, bien que plus coûteuse qu’une ligne de
tramway, produisait moins de gêne en surface.
Aussi à Pau, les
retards dans la mise en service de Febus ou dans les travaux des
halles à l’approche des élections 2019 doivent certainement
irriter M. Bayrou.
Note
2 : Eric Chauvier parle
d’urbanité dégradée pour les Centres Commerciaux périphériques
et avance que l’urbanité par le commerce pour les villes sera
remplacée par une urbanité basée sur la « réalité
augmentée ».
Ces sujets ont certainement été abordés
lors des Assises Nationales du Centre-Ville
des 3 et 4 juillet
2019, certainement voulues par M. Brin à Pau et qui l’honorent.
Bibliographie
:
(1) :
Villes moyennes, petites villes : déclassées ou mal gérées ?
; Tous Urbain N°21 ; Janvier 2018. Avec notamment des emprunts
à l’urbaniste Stéphane Cordobes, au géographe Philippe Estèbe
ou à l’anthropologue Eric Chauvier.
(2) : Pierre Veltz ; La France des territoires, défis et promesses ; Edition de l’aube ; 2019
(3) : Laurent Davezies et Magalie Talandier ; L’émergence de systèmes productivo-résidentiels ; La documentation française ; 2014
(4) : Jean-Paul Mazoyer ; Transformation digitale : et si l’on faisait le pari des territoires ? ; Débat§Opinions ; La République des Pyrénées des 27 et 28 avril 2019
(5) ; https://barrobjectif.com/laurence-fleury-les-nouvelles-bergeres-des-pyrenees/