Un peu de philosophie…

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Un peu de philosophie dans les temps troublés qui nous enveloppent cela peut aider. Comprendre le monde plutôt que le dire ou le montrer n’est-ce pas l’essentiel ? Nous avons fait de la planète une sorte de spectacle permanent, relayé par les télévisions en continu ou les réseaux sociaux. Ces derniers portent le chapeau d’une dégradation continuelles de nos relations (jusqu’à quand ? jusqu’où ?). C’est oublier un peu vite qu’ils ont joué un rôle décisif dans les révoltes du Moyen-Orient, aujourd’hui au Liban, en Irak ou en Iran où tout semblait verrouillé à l’extrême. Ils ont ouvert les yeux et permis la parole : dénonçant la prévarication et la tyrannie. Ne jetons donc pas le bébé avec l’eau du bain même si les excès des uns peuvent, à juste titre, choquer voir même révolter par leur violence dans le débat pénible qui nous est imposé en France.

Revenons à la philosophie : la position du « Penseur », la géniale statue de Rodin qui nous le montre nu, sans arme et immobile, est à l’opposé de celle du journaliste bouillant, survolté et superficiel qui n’aura jamais de statue pour l’immortaliser (quel que soit sa bonne foi ou son indépendance d’esprit). L’un est dans la Réflexion, l’autre dans l’Action. Le second devra faire référence au premier. C’est l’autre qui restera dans l’Histoire. Rien n’arrêtera la force de la Pensée, ni gazette, ni blog, ni network…Qu’est-ce d’ailleurs que le journalisme aujourd’hui où il suffit d’occuper un fauteuil aux « Bouffes », près du Président, et d’envoyer un tweet de trois lignes pour se poser en héros de la profession ?   

Le monde est désormais inquiétant : la mort a fait irruption dans le déroulement du feuilleton de l’actualité, dominé jusque là par la Réforme des Retraites… de la gnognotte à côté de l’épidémie de coronavirus. Elle est partie de Chine, un pays lointain, incompris des européens où se mêle un libéralisme tous azimuts à un communisme autoritaire. Ainsi un virus microscopique peut faire trembler un univers si compliqué à comprendre, qui avait promis de s’amender et de faire de la lutte contre le « Réchauffement Climatique » sa priorité. Promesse pour le moment restée lettre morte qui reposera sur les épaules des plus faibles qui paieront pour les autres.

La menace virale menace notre Edifice non seulement pour des raisons médicales évidentes : combien de morts ? De malades ? Serons-nous touchés ? Où cela s’arrêtera-t-il ? Mais aussi pour les conséquences que cet élément microscopique pourrait avoir sur la libre circulation des êtres humains et des biens de consommation. Avec une conséquence directe sur le commerce, lors du précédent épisode de risque de pandémie, les bourses mondiales s’étaient effondrées. De plus que va coûter un confinement élargi ? Qui paiera la facture ?

Mais c’est le spectacle de la mort, banni de notre quotidien, qui nous revient brutalement en pleine figure. On l’avait oublié. Il était resté caché : on ne meurt plus chez soi mais à l’EHPAD ou à l’hôpital et la mort des animaux, ces rituels ruraux, comme la chasse ou le « tue-cochon », est désormais vouée aux gémonies moralisatrices. Régis Debray dans son dernier livre « Le siècle vert. Un changement de civilisation » (éditions Tracts Gallimard) le dit mieux que moi : « La mort interdite rend l’air plus léger, et permet, dans un tournis de faits divers insignifiants, d’anodins babillages. Après la guerre zéro-mort, la ville sans tentures noires à fils d’argents sur les portes cochères, antichambre d’une vitalité zéro-mort, est une « utopie concrète » pour une fois concrétisée ».  

Avec l’irruption du Coronavirus, le citoyen -comme le journaliste- est bien obligé de revenir « aux Fondamentaux » : notre destin de Mortel est commun à tous. Le reste est subalterne. Il y, a dans l’être humain, un caractère essentiel qui nous différencie de l’animalité, c’est cette lucidité devant la mort. Nous savons dans quel cadre s’exercent nos actes, nous connaissons tous notre destinée, même si désormais tout nous incite à faire semblant de l’oublier.

C’est ce que Francis Wolff explore et élucide dans son « Plaidoyer pour l’universel » (éditions Fayard)*. Le philosophe dans son style rigoureux prône ainsi un retour aux valeurs humanistes portées par une définition précise de ce qui est « universel ». Il alimente, sans passion, un débat essentiel dans un moment où l’on loue la communauté qu’elle soit, par exemple, définie par l’âge (« jeunisme »), la pratique sexuelle (le « genre ») ou religieuse. Il ne s’agit là que d’exemples…

Mais, je le dis bien mal et je lui emprunterai sa conclusion : « La globalisation semble rendre l’humanisme impossible car elle menace la diversité culturelle sans laquelle il n’y a pas d’humanité ; elle le rend pourtant nécessaire contre les faux refuges dans des identités imaginaires antagoniques. L’universel ainsi défini est notre seul point fixe et assuré dans le chaos des valeurs ».

 Pierre-Michel Vidal

*Francis Wolff sera au Parvis (Centre Leclerc Université) mardi à 18 heures. Entrée libre.

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Un commentaire

  • … la position du « Penseur » … est à l’opposé de celle du journaliste …
    … la mort a fait irruption dans le déroulement du feuilleton de l’actualité, …
    … le spectacle de la mort, banni de notre quotidien, nous revient brutalement en pleine figure. On l’avait oublié. Il était resté caché : on ne meurt plus chez soi mais à l’EHPAD ou à l’hôpital …

    Si le philosophe aime la sagesse, gageons que les 3 éléments de phrases ci-dessus donneront à celui qui les a écrites, aux journalistes et à tous leurs lecteurs, le courage civique de ne pas rester dans le seul plaisir de la lecture. Il est, en effet, un comportement courageux qui consiste à ne pas abandonner à sa famille le soin de décider pour soi, concernant le devenir de son corps, après sa mort. Il suffit de se positionner à l’égard de ses deux fins de vie éventuelles, avec la seule structure qui le rend possible en une seule fois, à savoir http://www.cerclebleu.org. Structure qui permet d’éviter de nouveaux cas de M. Vincent Lambert, après les 120 déjà répertoriés.