Par où trouver la sortie ?
Nous ne sommes pas encore sortis de ce long conflit historique. Il laissera des traces, car bien des citoyens auront perdu confiance.
Il a bien fallu se rendre à l’évidence : les danseurs de l’Opéra doivent quitter la scène plus tôt que vers 65 ans et les métiers pour lesquels la sécurité s’impose (pilotes d’avions et de poids lourds) doivent être régis par des règles particulières. Aussi, ce n’est que justice de prendre en compte la pénibilité : avoir une espérance de vie en bonne santé plus courte est un lourd fardeau. Il eût fallu commencer par là pour convaincre que les motifs de la réforme constituaient un progrès social.
Or nombreux sont ceux qui ont réalisé que l’objectif primordial du gouvernement est de gérer un budget (ce qu’on ne saurait lui reprocher), voire de reprendre une partie de ce qui a été lâché l’an passé, plus que d’aller vers plus de justice sociale ou de simplification.
Des signes ? Alléger la contribution des hauts salaires n’est pas une bonne piste ; une telle mesure choque celles et ceux qui ont la vie dure. En effet, si de hauts salaires peuvent être justifiés par les responsabilités assumées, après la période d’activité les exonérations envisagées ne se justifient plus autant et compromettent l’équilibre recherché. Ces exonérations semblent dictées par des options idéologiques en faveur d’un système par capitalisation alors que la majorité des Français est attachée à un système par répartition.
Et qui ne réalise pas que prendre en compte l’ensemble d’une carrière plutôt que les meilleures années représente une perte potentielle de droits pour la retraite ? De là viennent la perte de confiance et les craintes généralisées.
Enfin, présenter l’âge pivot comme l’instauration d’un malus est une maladresse. Les points constituent en eux-mêmes une incitation à rester au travail plus longtemps sans qu’il soit nécessaire de parler de malus. Ils pourraient être plus largement valorisés lorsque l’âge vient et que le travail devient plus pénible afin de renforcer cette incitation. On pourrait imaginer que ces points comptent double à partir de 60 ans ou de 40 ans d’activité. A l’inverse, les entreprises pratiquant largement la retraite anticipée pourraient être pénalisées en contribuant plus à l’abondement des caisses de retraite. De plus, il devrait y avoir des incitations à se mettre au travail productif plus tôt alors que de nombreux jeunes repoussent l’entrée dans la vie active.
Vers quoi allons-nous ? Probablement des raidissements et des actions coup de poing. Cela ne renforcera pas la cohésion sociale ni l’image du pays. Des compromis sont nécessaires. Il doit être possible d’instaurer un système équilibré et pérenne. Certains régimes le montrent.
Paul Itaulog
« Il a bien fallu se rendre à l’évidence : les danseurs de l’Opéra doivent quitter la scène plus tôt que vers 65 ans »
Raisonnement stupide. Si les danseurs peuvent prendre leur retraite à 40 ans (?) pourquoi pas la même chose pour les footballeurs , les athlètes, les sportifs de haut niveau, les gens du cirque, …etc
Non, ils font comme les autres ils se reconvertissent ou font prof de danse !!!
« Aussi, ce n’est que justice de prendre en compte la pénibilité : avoir une espérance de vie en bonne santé plus courte est un lourd fardeau. »
Alors on commence par une règle d’équité ? Les femmes qui ont deux ans d’espérance de vie de plus que les hommes devront travailler un an de plus ?
Sur le problème de la pénibilité je ne le vois jamais associé au salaire et autres importants critères compensatoires. Pourquoi ?
Le salaire est adapté par le marché à différents critères tel que les compétences, la performance, la créativité, etc .. mais aussi à la pénibilité.
Les personnes travaillant de nuit ou en équipe ont des compensations par rapport à celui qui fait le même travail de jour.
Celui qui est en déplacement ou travaille sur des chantiers à l’étranger par exemple a de nombreuses compensations pour attirer cette main d’oeuvre, c’est la loi de l’offre et de la demande.
Mais en France c’est le mur des lamentations permanent, l’Etat doit tout au citoyen… et l’inverse ?
Des compromis sont toujours possibles et souhaitables. Cependant l’affaire est mal engagée. Sans doute faut-il l’inscrire dans un contexte de doute général face aux évolutions sociales et à un pouvoir qui préfère la manœuvre à la discussion. Lors des accords de Grenelle en 1968, De Gaulle avait dit à Pompidou qui menait les débats, en parlant des syndicats: « ne leur mentez jamais! » Nous sommes dans un tout autre « managment » avec aux manettes l’ex-drh d’Auchan. Le but est de faire plier l’adversaire plutôt que de trouver un arrangement avec lui.
L’objectif est très politique pour Macron : montrer qu’il peut avoir le dernier mot et que par conséquent il est le meilleur garant de l’ordre et de la réforme. Ainsi il compte arriver en bonne position aux présidentielle s’appuyant sur l’électorat conservateur. La lecture de la réforme des retraites -dont la nécessité est controversée- est avant tout politique. C’est en somme l’acte I de la future Présidentielle.
On voit bien avec l’affaire Villani que l’obsession macronienne est de s’inscrire dans la durée: de limiter les dégâts aux municipales puis obtenir un second mandat à la tête de l’Etat. Face à cette détermination les syndicats ne gagneront pas et le mouvement anti-réforme perdra son appui progressivement. Le choix d’une sorte de « guérilla » serait impopulaire. La sortie sera donc délicate. « Il faut savoir arrêter une grève » même si on pense avoir raison.