Déni de démocratie

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Il fallait s’attendre bien sûr à une faible participation aux élections municipales du dimanche 15 mars 2020. Mais à ce point là personne ou très peu osait l’envisager. La conséquence du Covid 19 n’est pas sans poser un certain nombre de questions.

En premier lieu on peut légitimement s’interroger sur la véritable représentativité des candidats. L’exemple de Pau est significatif. Sur 45 882 inscrits seulement 16 264 se sont déplacés pour aller voter, soit 35,4%. Il n’y a eu que 15 786 suffrages exprimés ce qui représente une proportion de 34,4% par rapport aux inscrits. Si l’on considère que François Bayrou a obtenu 7 235 voix, on constate que cela donne 45,83 % des suffrages exprimés mais seulement 15,76% des inscrits. Il aurait pu être élu au premier tour avec la moitié, plus un, des suffrages exprimés, c’est à dire 17,20% des inscrits. Dans ces conditions peut-on considérer que le suffrage est représentatif de la volonté des électeurs. Ne serait-ce pas là une des faiblesses de notre démocratie et de ses règles ? L’exemple de Pau est aussi valable pour d’autres villes du Béarn où certains candidats, élus au premier tour, comme c’est le cas pour beaucoup de sortants, n’obtiennent en définitive qu’un résultat relatif. On peut aussi s’interroger sur le fait que si la participation avait été plus importante, François Bayrou aurait pu être élu dès le premier tour. Il le regrette, lui, qui dans son for intérieur pensait être élu au premier tour.

C’est ainsi, nous verrons ce que donnera le second tour si tant est qu’il ait lieu. Le jeu des alliances en sous-main, les conditions sanitaires exceptionnelles ne permettent pas d’y voir très clair. Le débat actuel porte sur le maintien ou non du second tour. La situation est inédite et les constitutionnalistes experts ou prétendus, ont du mal à se mettre d’accord. Comme toujours le premier réflexe est de se reporter au code électoral. En la circonstance, le texte dit que si second tour, il doit y avoir, il a lieu obligatoirement le dimanche suivant le premier tour. Cette règle exclut la possibilité d’un second tour reporté à une date non déterminée. Si cela était le cas, quid des résultats du premier tour ? Les élus du premier tour le resteraient-il ? Ne faudrait-il pas tout reprendre à zéro en considérant que ce premier tour n’a jamais existé ? Faudra-t-il modifier le code électoral ? Et si oui le délai d’une semaine sera-t-il suffisant pour le faire ? Faudra-t-il déclarer en fonction des circonstances exceptionnelles l’état d’urgence ? Une hypothèse qui offrirait la possibilité de tout annuler et reporter sine die ces élections municipales.

Toutes ces difficultés, l’aggravation de l’état sanitaire de notre pays plaident pour une annulation et un report de ces élections. On verra ce que décidera l’exécutif. Mais d’ores et déjà on peut dire que les résultats de ces élections ne sont pas aussi représentatifs qu’ils devraient l’être.

Pau, le 16 mars 2020

par Joël Braud

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2 commentaires

  • Beaucoup de listes à Pau, peu de votants. Mais comment faire son choix, au juste ?
    Ce que laisse paraitre la forte abstention, c’est la dévalorisation de la parole politique. Les propos de campagne, les brochures de campagne, les promesses de campagne, il semble y avoir de moins en moins de monde pour leur faire confiance.
    A moins de suivre régulièrement l’actualité municipale et politique, pour faire son opinion sur la durée, pas facile de savoir qui prendre au sérieux parmi les multiples opposants. Ce qui (sauf désastre local) revient à un avantage aux sortants, comme on le constate dans bien des villes.

    • Il sera en effet difficile de faire la part des causes de l’abstention. Elle est très forte, sans doute trop importante. Mais quelle en est la principale raison : la dévalorisation de la parole politique ou les contexte actuel de Covid 19. Cette perte de confiance est grave et sans doute elle ne sera pas retrouvée avant longtemps.