Sujet de Bac : Vérité ou Mensonge ?

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Il aura fallu attendre l’irruption de ce fichu virus pour mesurer l’importance que le Baccalauréat pouvait avoir dans notre société : pour les jeunes d’abord mais aussi pour les parents et souvent les grands parents. C’est une sorte de rite de passage. Même si, le plus souvent, il ne débouche pas sur une entrée dans la vie professionnelle, il permet d’aborder le monde d’une autre manière, avec à la clé  une indépendance plus grande et pour certains le départ du nid familial. La suppression ponctuelle de cette énorme « machine », à la logistique complexe, a causé un vrai traumatisme bien compréhensible.

Le Bac sera remplacé cette année par un contrôle continu. On aurait pu envisager, dans l’ancienne formule, une épreuve de philosophie liée par exemple à la question de la Vérité et du Mensonge. A partir de la problématique des masques et du coronavirus, nous pourrions libeller une question ainsi : « Vérité ou Mensonge ? Que vous inspirent les directives du gouvernement liées au port du masque de protection dans la période que nous vivons ? Argumentez ! Dites-nous votre point de vue en trois points : thèse, antithèse et synthèse ».

Thèse : le gouvernement a assuré pendant plusieurs semaines que le port du masque était inutile voir même « contre-productif ». Il s’appuyait, pour ce qui concerne son argumentation, sur les déclarations de scientifiques comme Philippe Vanhems professeur d’épidémiologie et de santé publique à Lyon qui déclarait sur France Inter, le 27 février dernier : « À l’heure actuelle, il est inutile de porter un masque pour se protéger dans la rue et il n’y a pas de sens à en généraliser le port. Le nombre de cas est bas et l’on est plus exposé au virus grippal qu’au coronavirus ». S’appuyant sur cette expertise Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement affirmait le 17 mars que : “les Français ne pourront pas acheter de masque dans les pharmacies car ce n’est pas nécessaire si l’on n’est pas malade”. Donc il ne fallait pas porter de masque nous précisait-on, il fallait se « contenter » de rester confiné, d’observer les normes de distanciation sociale, et des gestes barrières bien nécessaires, évidemment avec ou sans masques.

Antithèse. Changement de doctrine à partir du début avril. Vendredi 3 avril, le directeur général de la santé, Jérôme Salomon déclare : « Nous encourageons le grand public, s’il le souhaite, à porter des masques, en particulier ces masques alternatifs qui sont en cours de production » (Le Monde). Dans la foulée, de nombreuses villes rendent obligatoire le port du masque c’est le cas de Nice par exemple (où se les procurer ?). La Communauté Urbaine de Bordeaux propose de distribuer des masques gratuitement à chacun de ses habitants. A quand une décision de ce type dans notre bonne ville de Pau ?

Ce virage à 180% dans la doctrine de l’Etat concernant le port du masque a surpris. Les scientifiques se seraient donc trompés ? Le gouvernement nous aurait donc menti sur ce point essentiel ? Quelle a été la raison véritable de ce changement ? En pleine polémique, le 21 mars, Olivier Véran le ministre de la santé confiait lors d’une conférence de presse que le « stock d’État » n’était alors que de 86 millions de masques. Pour y remédier, le gouvernement commandait « plus de 250 millions de masques ». Le chiffre passera à plusieurs milliards et, paradoxe, ces masques sont commandés à celui auquel on venait de céder nos stocks : le Régime Chinois, qui, sans scrupules, les revendra aux plus offrants (les Etats Unis) sur les tarmacs même des aéroports.  

Synthèse. Fallait-il mentir et cacher que le stock de masques que nous possédions était insuffisant devant la vague dramatique qui nous attendait ? L’avouer, dire la Vérité : « nous en manquons cruellement », aurait-il provoqué des actes de panique ? Protéger les soignants et les leur réserver les masques, sans en expliquer les raisons véritables due à cette pénurie, était-ce la bonne stratégie ? Fallait-il au contraire dire la vérité sur nos réserves ? Le public aurait-il compris que ces protections devaient aller en priorité au corps médical ? Aurait-il admis qu’il s’agissait d’un impératif de santé public ?

Le respect global d’un confinement, pénible pour la grande majorité de nos concitoyens, montre que l’on a toujours intérêt à faire confiance, au corps social. Il y a eu des erreurs de communication nous dit-on. Peut-être mais la réalité est simple : dans une démocratie, dire la Vérité est la meilleure des communications. Les mensonges (même bien intentionnés) reviennent toujours, comme un boomerang, sur ceux qui les prononcent et entament la crédibilité de ceux qui les profèrent. Nous avons bien besoin de cette crédibilité dans ces moments terribles… Comme nous le disait déjà Ovide :  » Ne craignons pas de dire la vérité. « 

Pierre-Michel Vidal

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5 commentaires

  • Pierre-Michel Vidal

    In Le Figaro : « Le constat est sans appel: les incohérences successives dans la communication gouvernementale et le changement de doctrine quant au port du masque ont profondément érodé la confiance des Français. Ils sont 76 % à penser que le gouvernement leur a menti sur les masques «en les dissuadant d’en porter parce qu’il n’y en avait pas suffisamment pour les soignants», selon une étude menée les 8 mars et 9 avril auprès d’un millier de Français par Odoxa avec Dentsu Consulting, pour Le Figaro et Franceinfo ».

    • Je me demande où en sont les sondages (ou les études) en Inde. J’ai regardé « Envoyé spécial » hier soir.

      J’ai le sentiment que MM. Trump, Jonhson et autre Bolsanero sortiront renforcés à la sortie de cette pandémie.
      Pendant qu’ils referont le monde avec les chinois, nous (pour ceux qui en réchapperont) en serons encore à compter, de manière très suffisante n’en doutons pas, les insuffisances crasses de nos dirigeants nationaux ainsi que celles de l’Europe dans la gestion de la pandémie mais également dans la préparation de la sortie de la pandémie.

      Si nos dirigeants sont plus que suspectés de mensonge, j’ai l’impression qu’il n’en est pas de même pour MM. Trump, Jonhson et autres Bolsanero.
      Pourtant ils n’ont pas mieux préparé que nous le déferlement de la pandémie ; l’histoire des masques sur un tarmac chinois par exemple , même si je n’en connais pas l’échelle, peut être vue comme un exemple d’impréparation tout autant pour les USA que pour nous.

      Ils se seraient seulement trompés sur sa gravité et ainsi ne seraient pas suspectés de mensonge. Quant à M. Johnson, après sa contamination, il sera certainement célébré comme un héros.
      Et puis, comme ils n’ont pas persévéré dans leur erreur, ils seront perçus comme s’étant surtout inquiétés des conséquences de la pandémie et ayant bien préparé l’après pandémie .

  • Finalement l’exécutif nous a roulé dans la farine.
    C’est certainement pour cela qu’il n’y en a plus sur les rayons des supermarchés.
    Incriminer le corps social serait simpliste. On doit toujours lui faire confiance.

  • Pour illustrer votre démonstration (percutante) se reporter à la première page du « Canard Enchaîné » de ce 8 avril. On y voit un dessin intitulé : « Vive courbes et graphiques ». En abscisse le stock de masques et en ordonnée les préconisations gouvernementales sur le port du masques. Ainsi plus le stock est important plus les préconisations sont sévères. Elles vont de inutile à obligatoire.
    Autre point, je n’entends pas la ville de Pau s’investir pour organiser, comme à Nice ou à Sceaux, une distribution gratuite de masques. Il existe, parait-il, de louables initiatives de particuliers pour fabriquer de façon artisanale, cette protection. On dit que ces derniers regrettent de ne pouvoir organiser la distribution.