Sombres perspectives
Le journal Sud Ouest en date du 15 juin 2020, rapporte les données chiffrées d’un sondage de l’Ifop* (pour Directs.fr) concernant la participation au second tour des élections municipales. Les résultats sont alarmants et ne donnent pas une image très flatteuse de notre démocratie. Mais il ne s’agit que d’un sondage, reste donc à savoir si ces chiffre seront confirmés ce dimanche 28 juin.
En effet selon le résultat du sondage, seulement 38% des Français ayant capacité à voter se rendront aux urnes. Si cela se confirme, la participation sera inférieure à celle du premier tour. Ainsi, le 15 mars, le taux de participation dans les communes restant en lice pour le second tour, n’avait été que de 41,8%. Moins de la moitié des citoyens inscrits avaient fait le déplacement. Rappelons qu’à Pau le taux de participation était seulement de 35,44%. Pas très motivés, ni très exemplaires les citoyens palois ! Pour être plus précis sur les 34 968 communes françaises, seulement 4 827 n’ont pas élu un conseil municipal au complet et devront procéder à un second tour.
Mais là où cette étude devient inquiétante, c’est lorsqu’on demande aux personnes sondées ce qui les motive ou démotive de se rendre dans un bureau de vote. Un total de 29% dit avoir peur de la contamination de la covid 19. Et 35% évoque, non seulement la covid 19, mais également « d’autres motifs » sans qu’il soit permis d’en savoir davantage sur ces « autres motifs ». Des réponses difficiles à accepter aussi facilement que l’a fait l’organisme de sondages. Lorsqu’on se rend dans des commerces, petites, moyennes et grandes surfaces, on se rend bien compte que les gestes de distanciation sociale et les dispositifs barrière ne sont pas la principale préoccupation des chalands. A vue de nez, (il faut parfois se fier à ses impressions) il y a moins de la moitié des clients qui porte un masque et aucun n’est vraiment obnubilé par le respect des distances. Alors distraction ou oubli volontaire des consignes jugées trop contraignantes, difficile à dire. Cependant comment comprendre que d’un côté, par son comportement on se moque du risque d’infection et que de l’autre on en fasse un argument pour s’abstenir de remplir son devoir de citoyen électeur ?
Cette enquête de l’Ifop délivre également des informations qui tranchent avec ce que nous étions habitués à entendre jusqu’alors. Les sondés qui ont décidé de se rendre dans les bureaux de vote disent à 69% que leur choix sera guidé principalement par la gestion des finances et de la dette de la ville. Étonnant surtout lorsqu’on se souvient qu’auparavant, pour des élections du même niveau, primaient la sécurité (66%) et la propreté de la ville (65%). Peut-on en conclure qu’il existe maintenant un véritable désintérêt pour la vie et l’organisation de la commune ? Difficile à partir de ces seules données d’émettre un avis aussi péremptoire que définitif, mais enfin, il y a là quelque chose de nouveau. Alors quand les maires clament haut et fort qu’ils sont les élus préférés des Français, que c’est par eux que se joue la proximité avec les citoyens et qu’ils sont incontournables, il faut sans doute mettre un bémol à de telles affirmations. Au fait, à Pau, dans les programmes jusqu’à maintenant édités par les candidats, je n’ai pas vu d’engagement sur le remboursement de la dette et sur une gestion plus économe de l’argent du contribuable. Sans doute n’ont-ils pas encore eu connaissance de ce sondage.
La démocratie, si ces données sont confirmées par les faits, n’en sortira pas grandie. Une très, trop faible, participation entame la légitimé des élus. Et au delà de cette inquiétante perspective, il faudra aussi s’attendre à ce que les manifestations repartent, que les gilets jaunes soient sur les starting- blocks, que la réforme des retraites anime à nouveau la rue. Déjà les violences urbaines ont commencé à se faire entendre. Oui, sombres perspectives !
Pau, le 22 juin 2020
par Joël Braud
Une raison de la désaffection des électeurs aux votes, y compris locaux, proviendrait du décalage entre la société et les modes de gouvernements locaux (territoriaux).
La société étant de plus en plus mobile, la territorialité n’est plus qu’une des modalités de notre rapport à l’espace. La mobilité révèle un autre espace que le territoire : Le réseau.
Or les élections locales ne concernent essentiellement que la territorialité.
A l’échelle du pays (députés, sénateurs), des Régions ou des départements, on retrouverait le même décalage.
Comme le territoire n’est qu’un des états de l’espace des électeurs. Le repli territorial ne sera donc qu’une réponse partielle à tous nos maux.
Ces concepts d’espace et spatialité, territoires et réseaux, territorialités et réticularités sont approfondis par de nombreux géographes. Notamment Frédéric Tesson de l’UPPA qui a publié : « De la spatialité des acteurs politiques locaux. Territorialités et Réticularités ; PUPPA ; 2017 . 177 pages de texte. J’en suis à la page … 54.
Et on ne nous dit peut-être pas tout! Suivez mon regard!
https://www.lemonde.fr/politique/article/2020/06/21/municipales-a-bordeaux-le-maire-nicolas-florian-assigne-en-refere-pour-avoir-sollicite-des-procurations_6043608_823448.html
Quel que soit le nouveau maire il le sera en quelque sorte par défaut, le second comme le premier tour se seront déroulés dans un contexte où la démocratie aura été minorée: contacts directs limités, réunions publiques rares et surtout confrontations réduites. Tout ce qui fait l’intérêt d’une campagne électorale a été évacué. Les candidats ne sont pas exempts de responsabilité dans cette mièvrerie. Bayrou sous-estime son adversaire, nouveau en politique, et il pense que son propre bilan parle de lui-même. Il n’y a donc pas sujet à discussion. Face à lui Jérôme Marbot, inconnu avant la campagne, qui, sous le conseil de son entourage a décidé de ne pas attaquer sur son bilan le maire sortant. Objectif assumé: ne pas le valoriser. Est-ce une bonne stratégie? Ca n’est pas sur. Le challenger a pour mission d’attaquer; de tout évidence c’est un challenge pour lui, mais un match n’est jamais joué…
Nous sommes donc dans un faux rythme comme on le dit dans le sport. Un faux rythme ça n’est jamais bon pour les supporters. Ca n’est pas favorable aux mobilisations et aux enthousiasmes. Si on ajoute à cela la menace du Covid19 qui malgré le déchaînement scandaleux des bobos du canal Saint Martin, est toujours là, on peut s’attendre à une faible participation. Dans ce cas une surprise est toujours possible et la légitimité du gagnant (par défaut) sera discutable.