Liberté : la confusion entretenue.
« On s’était progressivement habitués à être une société d’individus libres» a dit Emmanuel Macron.
Libre ?
Qui ne dépend pas étroitement du pouvoir politique, qui ne subit aucune pression.
Qui a le pouvoir d’agir, de se déterminer à sa guise.
Qui n’est soumis à aucune contrainte, à aucun contrôle, à aucune restriction.
Nous ne sommes donc pas libres !
Cette déclaration s’est faite dans le cadre de sa fonction car :
Les citoyens français sont définis comme des êtres nés «libres et égaux en droit». La liberté dont il est question est donc une liberté légale, juridique, évolutive, qui s’adresse à une collectivité gérée par des lois.
«La liberté est le droit de faire tout ce que les lois permettent» Montesquieu.
C’est donc une liberté très encadrée :
«Nous sommes esclaves des lois, pour pouvoir être libres» Cicéron.
Dans ce cadre, la liberté individuelle était-elle respectée, comme le dit le Président ?
Que nenni ! Nous croire libres individuellement reviendrait à agir sans avoir conscience du monde qui nous entoure, or la liberté des uns s’arrêtant où commence celle des autres, plus on est nombreux, plus la liberté individuelle rétrécit (respect de la distanciation !).
Aucun être vivant n’est libre ; les formes solitaires sont contraintes par leur milieu intérieur, anatomique et physiologique, ainsi que par le milieu extérieur; plus la vie sociale se développe, plus les codes se multiplient pour assurer cohésion et sécurité.
La position libérale du Président introduit en plus la confusion car le libéralisme est « une doctrine qui se dit favorable au développement des libertés individuelles» alors qu’elle les bafoue par le jeu des rapports de force !
« Les actes humains sont réductibles au jeu des causes extérieures » Bergson.
Nous sommes esclaves d’un conformisme moral, intellectuel et comportemental. Ainsi, selon notre milieu social, nous agissons d’une manière qui semble être prédéfinie. Emile Zola a étudié ce fait dans Les Rougons-Maquart,
Nous sommes aussi esclaves de notre ignorance dans un milieu de plus en plus complexe où tout réagit sur tout, ainsi que de l’information diffusée :
«La liberté est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat.» Hannah Arendt.
Le fait religieux en fait partie et «cette farce» vient de nous conduire au sommet de l’horreur.
Des contraintes pèsent de plus en plus sur les individus : « Il y a un contrôle plus ténu qui s’exerce sur les gestes quotidiens au nom de la sécurité et de la santé (caméras de surveillance, interdiction de fumer, Plan Nutrition Santé…),assure Gilles Lipovetsky ; d’où un climat anxiogène généré au nom de l’épanouissement de soi ! Certes, on a plus de libertés privées et l’on a plus d’autonomie pour construire sa propre vie, mais il y a aussi de nouvelles formes de servitudes liées à l’emploi, à l’insécurité sanitaire. Ainsi, par exemple, la thématique de la santé est devenue obsessive. »
La situation pandémique actuelle, générée par l’économie «libérée» et mondialisée, est la cerise sur le gâteau des contraintes liberticides, un constat, même si elles sont justifiées parfois.
Dans le même temps l’argent et la consommation ont asservi les citoyens : On ne peut plus rien faire sans consommer, à part l’amour, et encore !
Le secteur marchand a envahi notre vie. La liberté est confrontée à de nouvelles formes de servitudes sous-jacentes insidieuses, entretenues par la publicité, nous laissant croire à notre liberté de choix. C’est l’addiction.
La multiplication de l’offre, par rapport au passé et aux possibilités financières actuelles de chacun, rend cette liberté du choix encore plus oppressante et sujette à des conflits sociaux permanents.
«Si donc les tabous des années 1960 sont objectivement tous tombés, il nous faut désormais repenser le sens du mot liberté en fonction des impératifs de notre époque, entre autres les impératifs environnementaux.»
signé Georges Vallet
crédits photos : Citation Jean-Louis Barrault liberte : La liberté, c’est la faculté …
quel beau style d’écriture!
Très utile analyse… Il faut que des voix de bon sens, de logique et de mise en garde puisse s’exprimer fortement surtout en temps de doute et de crise. Mais il faut surtout repenser la Liberte d’expression ! Trop de gens ont peur… et se taisent !