La justice peut-elle apprécier ce que dit la médecine ?

Comme si le brouhaha gouvernemental n’était pas suffisant à troubler notre humeur, voilà que les décisions de diverses juridictions administratives nous interpellent.
Alors que des préfets avaient pris des arrêtés imposant le port du masque en extérieur, trois jugements en ont suspendu l’application au motif que la mesure « portait une atteinte excessive, disproportionnée et non appropriée à la liberté individuelle ».
Tant qu’un tribunal statue sur la légalité de telle ou telle décision, rien de plus normal dans un Etat de droit , mais sur quel critère, sinon le sien, peut-il censurer la décision d’une autorité administrative ?
L’excès, la disproportion et l’inopportunité sont des ressentis mais peuvent-elles motiver une décision judiciaire ?
Ces critères n’ont-ils pas un caractère trop subjectif et ne témoignent-ils pas d’une substitution de l’autorité judiciaire au pouvoir exécutif et peut-être même à la science médicale ?
On imagine aisément, en effet, que les décisions préfectorales ont été prises sur les avis d’autorités médicales qui se trouvent de facto soumis à une censure judiciaire.
Y aurait-il conflit entre les autorités judiciaires et les autorités scientifiques ?
Dans un domaine plus général de nombreuses voix s’élèvent contre le pouvoir non seulement des tribunaux et même du Conseil Constitutionnel qui les conduit soit à censurer un texte législatif ou autre, soit à lui donner une orientation qui constitue sans le dire une opposition aux pouvoirs dont ils émanent.
Et à tout cela s’ajoutent les contraintes du droit européen de moins en moins supportées par les peuples qui y sont soumis.
La fonction judiciaire semble avoir évolué. Est-elle encore la bouche qui dit le droit ou celle qui le crée ?
Pierre ESPOSITO